Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le Monde de Djayesse

Le Monde de Djayesse

Un peu de tout : du cinéma (beaucoup), de l'actu (un peu) et toute cette sorte de choses [A bit of everythying: cinema (a lot), news (a little) and all this kind of things]

Publié le par Djayesse
Publié dans : #Cinéma, #Henri-Georges Clouzot, #Policier
L'assassin habite au 21 (Henri-Georges Clouzot, 1942)

« Monsieur Durand, c'est moi. »

Monsieur Durand, c'est surtout un tueur anonyme qui élimine ses victimes pour leur dérober leur argent. Ca commence - pour nous - avec Alfred (René Génin), un SDF comme on dit de nos jours, qui vient de gagner à la loterie. Un coup d'épée et hop. Plus d'Alfred.

Le problème, c'est que c'est déjà la dixième victime de ce monsieur mystérieux.

Alors la police met sur le coup son meilleur limier : Wenceslas Worobietchik (Pierre Fresnay) - Wens, c'est plus facile à dire.

Rapidement, Wens repère son repaire (!...) : La pension de famille les Mimosas, rue Junot. au 21.

 

Un an après le Dernier des 6, voici le retour de du commissaire Wens, encore interprété par Pierre Fresnay. Encore une fois, l'histoire de Steeman est adaptée par Clouzot, mais cette fois-ci, c'est ce dernier qui est passé derrière la caméra. Et comme si ça ne suffisait pas, il a aussi écrit les dialogues. Et pour un premier long métrage, c'est plutôt réussi. Et comme dans tous les films qui vont suivre, ce n'est pas spécialement l'intrigue qu'on retient, mais plutôt les gens et les rapports qu'ils entretiennent entre eux. Nous sommes dans une atmosphère policière digne des films noirs américains, et pourtant, il n'y a pas de super détective pour résoudre l'énigme. Même Wens, qu'on peut considérer comme un ténor de la Police Judiciaire, n'est pas un surhomme : il a des points noirs et dort avec un bonnet de coton ! Et en plus, il est affublée du femme hors du commun : Mila Malou (Suzy Delair). Parce qu'il faut la supporter, la Mila. Ce n'est pas ce qu'on peut appeler une femme fatale. Dans la série Les Capricieuses, elle a sa place. Elle s'est débarrassée de sa bonne qui l'avait traitée d'enquiquineuse, ce à quoi Wens a répliqué : « toute vérité n'est pas bonne à dire. » Et cela résume bien la personnalité de Mila, malgré tout très amoureuse de son Wens.

Après, les autres pensionnaires des Mimosas valent le déplacement : M. Colin (Pierre Larquey), artisan qui fabrique des poupées à l'effigie de Monsieur Durand ; le docteur Linz (Noël Roquevert), ancien médecin de la Colonial ; Lalah-Poor (Jean Tissier), illusionniste et un tantinet kleptomane ; et Melle Cuq (Maximilienne), « une vraie jeune fille »; et le serviteur-siffleur, et madame Point (Odette Talazac), « une grosse dondon » un peu hommasse, et le boxeur Kid Robert... Toute une faune ! [Et en plus, servie par une distribution riche : beaucoup de seconds rôles du cinéma, de Balpêtre à Pérès, en passant par Gabriello... Des Noms !]

Mais c'est dans leurs rapports que Clouzot s'épanouit. Ils se guettent, ils s'épient, fouillent les uns chez les autres... Quand ils ne se chamaillent pas dans la salle commune !

D'ailleurs, le trio Larquey-Roquevert-Tissier est magnifique à en voler la vedette à Pierre Fresnay, la star annoncée au générique. Nous avons ce qui se faisait de mieux dans les seconds rôles du cinéma français de l'époque. On retrouvera d'ailleurs les deux premiers (avec Fresnay) dans le film suivant de Clouzot : le Corbeau.

Et puis il y a l'Arlésienne du film : Monsieur Durand. On parle beaucoup de lui, on assiste à ses méfaits... Mais on ne le voit jamais. On sait qu'il attaque au pistolet et à l'épée, qu'il a une canne (pour dissimuler son épée) et donc boîte, et qu'il fume à l'aide d'un porte-cigarette. Pour le reste, Clouzot utilise, avec brio, une caméra subjective dès la première agression, et pour les suivantes. Seule la dernière agression nous donnera (une partie de) la solution quant au meurtrier.

Mais qu'importe, le plus important, c'était cette atmosphère un rien mesquine, un rien poisseuse qui nous a réjouit pendant ces quatre-vingt-quatre minutes. Sans parler des dialogues qui valent bien ceux de Jeanson ou Prévert -autres dialoguistes de génie de l'époque.

Oh, et puis si parlons-en, des dialogues :

« Vous êtes libre ? - Où allez-vous ? - A Jaurès. - Pas moi. » (René Génin, taxi)

« T'as tellement confiance en moi ? - Comme dans ma sœur, parce que vous lui ressemblez.

- Qu'est-ce qu'elle fait, ta sœur ? - Elle est taulière, à Clermont. » (Pierre Fresnay, Raymond Bussières)

 « J'aime mieux mon château hanté.

- Evidemment, vous vous sentirez plus à votre aise au milieu des vieilles chouettes ! » (Maximilienne & Noël Roquevert)

« Dans les rues de Montmartre, on trouve moins de pasteurs que de pouffiasses... Euh, je veux dire : plus d'âmes égarées que de ministres du culte. » (Odette Talazac)

 

Un premier film qui est déjà un coup de maître.

 

Commenter cet article

Articles récents

Hébergé par Overblog