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Le Monde de Djayesse

Le Monde de Djayesse

Un peu de tout : du cinéma (beaucoup), de l'actu (un peu) et toute cette sorte de choses [A bit of everythying: cinema (a lot), news (a little) and all this kind of things]

Publié le par Djayesse
Publié dans : #Cinéma, #Guerre, #Steven Spielberg
Cheval de Guerre (War Horse - Steven Spielberg, 2011)

Au début, c’est un roman de Michael Morpurgo (1982). Puis ce fut une adaptation sur scène par Nick Stafford (2007).

Et depuis 2011, c’est un film inoubliable du grand Steven, qui retourne au film de guerre avec à nouveau beaucoup de talent et de bonheur.

 

Devon, 1914.

Outre d’être le décor de la plus célèbre romancière de policiers d’Angleterre, c’est aussi le théâtre d’une grande histoire d’amour entre un jeune garçon – Albert Narracott (Jeremy Irvine) – et un cheval – Joey.

Joey est une bête splendide, ces chevaux qui gagnent – haut la main – les courses. Mais Ted Narracott (Peter Mullan) l’a acheté pour en faire un cheval de trait, quitte à finir sur la paille. C’est donc Albert qui va l’entraîner. Et y parvenir.

Mais la guerre arrive et Joey est incorporé et Albert reste seul (il n’est pas encore d’âge à partir).

 

Comme je l’écrivais plus haut, Spielberg retourne au film de guerre et en deux assauts, il nous rappelle qu’il maîtrise le genre, comme il nous l’avait déjà montré dans Save Private Ryan une douzaine d’années plus tôt (1). On retrouve, sinon les mêmes assauts, du moins le même résultat : des morts. Bien sûr, on pense à Kubrick et ses Sentiers de la gloire quand Albert fonce vers la tranchée ennemie, mais c’est une autre référence qui a retenu mon attention :

Après la première charge – pour de vrai – à laquelle participe Joey, Spielberg prend de la hauteur pour nous montrer l’étendue des dégâts : ce sont plusieurs, puis des dizaines de chevaux et de cavaliers qui s’offrent à notre regard, accentuant l’aspect dérisoire de la guerre. Et le mouvement de caméra n’est pas sans rappeler celui de Gone with the Wind quand nous découvrons l’ampleur des combats d’Atlanta.

Mais surtout, Spielberg, en filmant les deux assauts nous gratifie d’une ellipse temporelle magistrale : quatre ans ont passé entre la charge des officiers britanniques et la prise de la tranchée adverse par les Tommies, mais c’est avant tout une nouvelle ère qui vient de commencer, reléguant à l’âge de pierre ce premier fait d’armes pour entrer de plain pied dans le XXème siècle et surtout la guerre moderne.

En prime, nous avons une image superbe du premier assaut qui voit les mitrailleuses allemandes crépiter pendant que les chevaux sans cavaliers leur sautent par-dessus. Magnifique.

 

Et comme nous sommes chez Spielberg, il faut chercher l’enfant. Et il n’y a pas beaucoup à chercher pour le trouver. Il prend trois formes.

La première, c’est bien sûr Albert, qui voit grandir Joey avant de l’adopter. Leur relation est une véritable relation d’amitié, plus forte que celle qui le lie avec son ami Andrew (Matt Milne), avec ses promesses illusoires qu’on espère tenir malgré tout.

La seconde concerne la jeune Emilie (Céline Buckens) qui, à l’instar d’Albert va nouer une relation forte avec Joey – qu’elle appelle François – et qui aura une incidence sur le final où intervient le grand-père de la petite jeune fille (2). Elle est un mélange de naïveté et de gravité qui lui donne une épaisseur intéressante : à la croisée des chemins entre l’enfance et l’adolescence.

La troisième forme est plus subtile et concerne les soldats eux-mêmes : il est de coutume pour les Anglo-Saxons d’appeler leurs militaires « boys », ce qui signifie « garçons ». Et Spielberg ne s’y trompe pas : tous ces jeunes gens qui sont partis se battre – et surtout mourir – ne sont que de grands enfants, à peine sortis des jupons de leurs mères. Il suffit de voir la rencontre entre le Britannique Colin (Tobby Kebbel) et l’Allemand Peter (Hinnerk Schönnemann) pour s’en convaincre : la relation qu’ils nouent en peu de temps abolit les frontières et nous fait oublier ce conflit – qui arrive à son terme. Ce ne sont plus deux soldats qui évoluent devant nous mais bien deux copains qui s’allient pour se sortir d’une situation inextricable.

Et c’est là que l’on retrouve la dimension merveilleuse du cinéma de Spielberg : sans artifice ni effet numérique spectaculaire, il nous sort de cette guerre sordide et amène un espoir de paix.

J’ajouterai une quatrième forme avec les deux jeunes soldats allemands qui vont déserter. Si Günther (David Kross) semble avoir l’âge requis, Michael (Leonard Carow), son frère, n’a que 14 ans (3). Et la désertion ne s’explique que par la même raison qui fait promettre Albert à Joey de se retrouver quand tout sera terminé : Günther a promis à sa mère de veiller sur son jeune frère. Et c’est précisément cette promesse qui va précipiter leur mort : vous connaissez le sort des déserteurs en temps de guerre.

 

Bref, Spielberg réussit à nouveau un grand film, servi par une intrigue originale et habile : voir la guerre à travers les yeux d’un cheval (4). A cette belle histoire s’ajoute le talent de Spielberg, mais pas que : la musique de son complice John Williams crée elle aussi l’ambiance, et l’interprétation est à la hauteur de l’événement : outre les personnes déjà citées, j’ajouterai Emily Watson (la mère d’Albert) ou encore David « Lupin » Thewlis, ou encore Tom « Loki » Hiddleston et Dominic « Sherlock » Cumberbatch qui se retrouvent tous, finalement, dans des seconds rôles.

La vraie vedette, c’est Joey !

 

  1. Treize pour être précis.
  2. Niels Arestrup, formidable.
  3. La fin de la guerre vit entrer dans le conflit des très jeunes soldats.
  4. Et on les voit ces yeux : ils appartiennent même aux 14 chevaux qui ont été nécessaires pour interpréter Joey…
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