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Le Monde de Djayesse

Le Monde de Djayesse

Un peu de tout : du cinéma (beaucoup), de l'actu (un peu) et toute cette sorte de choses [A bit of everythying: cinema (a lot), news (a little) and all this kind of things]

Publié le par Djayesse
Publié dans : #Cinéma, #Steve Buscemi, #Prison
Animal Factory (Steve Buscemi, 2000)

Animal Factory.

Le titre original – pour une fois non traduit – amène une ambiguïté qui, ‘une certaine façon, va baigner tout le film.

En effet, doit-on traduire par « Usine d’Animaux » ou « Usine pour Animaux » ?

En clair : les hommes qui peuplent cette « usine » sont-ils déjà des animaux quand ils y arrivent, ou le deviennent-ils ? (1)

 

Il y a dans le cinéma une fascination compréhensible pour les films carcéraux. En effet, pour la plupart des spectateurs, c’est un univers inconnu sauf par le biais de films (I’m a Fugitive from a chain gang, Brubaker ou encore The Shawshank Redemption) comme de séries (Prisoner, Wentworth, etc.). Et comme (presque) dans tous les autres, on retrouve les thèmes associés : violence, solidarité, racisme, homosexualité…

C’est plus la façon de traiter le sujet qui fait l’intérêt du film. En effet, Steve « Shut the fuck up, Donnie » Buscemi est un acteur et il donne la part belle à ses collègues, Willem Dafoe (Earl Copen) en tête.

 

Mais si Earl Copen est la figure centrale du film, c’est tout de même le point de vue de Ron Decker (Edward Furlong) que nous suivons.  Ron est un jeune homme qui est tombé pour trafic de stupéfiants (marijuana) et se retrouve à Saint Quentin auprès de détenus au passé pas toujours aussi léger que le sien.

Il est jeune et beau, ce qui amène immanquablement certains autres détenus à s’intéresser à son corps. Heureusement (?), Earl Copen veille et Ron passe un séjour qui eût pu être largement pire.

 

Bien sûr, c’est avant tout la relation entre les individus qui reste le centre de l’intrigue. Ron est un témoin muet de ce qu’il se passe autour de lui. Et s’il est franchement novice dans cette prison, il en apprend rapidement le fonctionnement et les différents rouages, et surtout la sexualité qui y règne.

Cet univers est un concentré de divisions, voire de discrimination. En effet, on retrouve l’opposition raciale (Noirs vs Blancs) ainsi qu’une distinction entre ceux qui travaillent et les inactifs, et au milieu de tout cela : Earl.

 

Earl rappelle à l’envi que cette prison est la « sienne », et ce que nous voyons ne lui donne pas vraiment tort, tant beaucoup de choses tournent autour de lui. Mais s’il jouit d’un traitement particulier, il n’en échappe pas moins aux châtiments pour des échauffourées particulièrement graves (isolation pendant plus d’un an, etc.).

Tout ce qui se passe dans la prison est su par Earl qui est le médiateur entre les détenus ainsi qu’avec les surveillants.

Sa relation avec Ron a une ambiguïté que ce dernier perçoit. Earl ne s’en cache pas et joue franc jeu : s’il protège Ron, c’est parce qu’il n’est pas laid.  Et sa relation reste ambiguë tout le long du film pour le spectateur, alors que pour les autres détenus – ceux qui ne savent pas la véritable nature de leurs relations – cela ne fait aucun doute.

 

Et puis il y a l’Etat, le véritable patron de cette prison. Il est représenté par quelques policiers, et surtout un magistrat – H.R. Hosspack – qui est tout naturellement interprété par Steve Buscemi lui-même. En effet, ce magistrat est le véritable représentant (et chef) de la Loi. Ses rares interventions se situent dans des affaires graves survenant dans la prison.

D’une certaine façon, il est son propre porte-parole, se basant seulement sur les faits, condamnant ou non les différents détenus à qui il a affaire.

 

Mais malgré tout, Buscemi (réalisateur ne répond pas complètement à la question (voir ci-dessus), laissant le spectateur se faire sa propre conviction.

D’un côté, on assiste à des relations pleines d’humanités de la part de détenus considérés comme des cas irrécupérables (Earl en fait partie), mais d’un autre, Ron qui n’a à son actif qu’un délit plutôt mineur, se retrouve impliqué dans des actions qui relèvent du criminel, devenant d’une certaine manière un des animaux de cette usine.

 

Finalement, ce très beau film reste une chronique. La description ordinaire d’un univers particulier sans véritable part pris. Aucun des hommes qu’on croise n’est « innocent » comme c’est parfois le cas dans ce type de films. A aucun moment on ne remet en cause la présence de tous ces hommes dans cet établissement.

Quant à la rédemption qu’on pourrait attendre (2), elle n’existe pas. La rédemption ne concerne que les hommes qui ont péché. Or tous ces personnages, de par leurs actions criminelles passées, ne sont plus des hommes.

 

D’où le titre.

 

PS : une mention spéciale pour Mickey Rourke, interprétant magnifiquement Jan, un détenu ouvertement homosexuel dans des atours de travesti.

 

 

  1. « Traduction = Trahison » c’est bien connu : dans ce cas, choisir une traduction plus que l’autre aurait induit un choix que seul le spectateur doit faire.
  2. Comme dans beaucoup de films américains, je ne vous apprends rien…

 

 

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