Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le Monde de Djayesse

Le Monde de Djayesse

Un peu de tout : du cinéma (beaucoup), de l'actu (un peu) et toute cette sorte de choses [A bit of everythying: cinema (a lot), news (a little) and all this kind of things]

Publié le par Djayesse
Publié dans : #Cinéma, #Guerre, #Ridley Scott
La Chute du Faucon noir (Black Hawk down - Ridley Scott, 2001)

Le niveau de maîtrise d’un réalisateur se mesure aussi à son aisance à passer d’un genre à l’autre sans pour autant que sa technique en pâtisse.

Nouveau défi pour Ridley Scott, donc : un film de guerre efficace et réaliste, sans pour autant tomber dans une glorification facile et attendue.

Pari réussi, mais en doutait-on ?

 

Nous sommes en 1993, le 3 octobre pour être précis, à Mogadiscio qu’on appelle alors « Mog », et le général Aidid (1934-1996) mène le pays d’une main de fer et surtout en l’affamant.

Les Nations Unis ayant envoyé des troupes, elles vont alors combattre les milices armées d’Aidid et ce qui ne devait être qu’une opération de routine – arrêter des membres du gouvernement pour faire pression sur le dictateur – va tourner au fiasco et surtout au massacre, suite à la chute d’un « Black Hawk » (Faucon Noir), un de ces hélicoptères de transports des soldats.

 

Ce seront d’ailleurs deux Black Hawks qui vont s’écraser au sol et que les soldats américains vont tenter se sécuriser (1), repoussant alors les différentes vagues d’attaques des miliciens somaliens.

Et au final, alors que 19 soldats américains trouveront la mort (dont deux seront décorés à titre posthume (2)), on comptera plus de 800 victimes somaliennes.

Mais ici, bien sûr, ce sont les victimes américaines qui sont à l’honneur et parfois à l’horreur.

En effet, tout comme l’avait magistralement montré Spielberg dans sa vision du Débarquement (Save Private Ryan, 1998), la guerre est une entreprise mortelle et toute glorification ne tient pas  face à la citation de Platon (3) qui ouvre le film : « Seuls les morts ont vu la fin de la guerre. »

Et ici, ça en fait des gens qui ont vu la fin de la guerre. Et de quelle manière !

 

C’est un déferlement, une pluie continue de balles qui fauchent – avec discernement (19 vs 800 et plus) – avec une violence rare : des corps déchiquetés, du sang qui coule lui aussi à flot, et des situations spectaculaires mais pas toujours supportables.

Bref, c’est un film de guerre sale (la guerre, pas le film) ce qui ne m’empêche de penser qu’on a à nouveau une forme de pléonasme (4) : qu’on me présente une guerre propre, et on en reparlera.

 

De plus, la distribution est constituée de personnalités qui ont depuis (pour certains) pris une plus grande part dans le cinéma actuel

 

De plus, la distribution est constituée de personnalités qui ont depuis (pour certains) pris une plus grande part dans le cinéma actuel (Orlando Bloom, Ioann Gruffudd, ou encore Nikolaj « Jaime » Coster-Waldau…) avec en prime le vétéran (c’est le cas de le dire !) Sam Shepard : il y interprète le général Garrison qui prit l’entière responsabilité de ce demi-fiasco à son compte.

On assiste même de sa part à une image rare qui n’est pas sans annoncer les derniers intertitres : alors que le sang d’un soldat blessé coule et se répand sur le sol de l’hôpital (de fortune, comme toujours), il prend un tissu et s’en va éponger le sang dont il est, d’une certaine manière, responsable d’avoir fait couler.

Cette attitude étonnante (pour un général) va un (tout) petit peu racheter cet homme qui fit tuer près d’un millier d’hommes, sans pour autant le dédouaner de ses responsabilités.

 

Le succès – mérité à mon avis – du film tient aussi au contexte dans lequel il sortit : trois mois après le terrible 11 septembre qui vit cette fois –ci le nombre de victimes américaines autrement plus élevé que dans ce film.

N’oublions pas tout de même qu’il n’y a aucun lien de cause à effet, le film ayant été programmé indépendamment de cet événement.

 

Mais il trouve tout de même un écho dans cette histoire d’intervention américaine à l’étranger, sous couverture des Nations Unies comme ici ou non (5), et qui était l’un des arguments d’Al-Qaïda pour justifier (6) ses frappes aériennes sur le sol américain.

Et quand le film se termine, sur le bilan évoqué ci-dessus, on en revient toujours à se demander quelle fut l’utilité de cette intervention : en quoi fut-elle pertinente et salutaire pour les Somaliens – qui vont subir encore trois ans le général Aidid – et surtout pour quel résultat ? Quand on sait qu’une fois l’ONU partie, la situation en 2006 (soit 15 ans après « Restore Hope » qui avait amené » ce dispositif militaire) était peu différente de celle connue sous le régime d’Aidid.

 

Quoi qu’il en soit, Ridley Scott film au plus près cette guerre « moderne » (la deuxième partie du titre du récit de Mark Bowden dont est tiré le scénario : elle est « moderne » dans son exécution et du fait de l’évolution des armes à disposition, mais ses effets n’ont rien de modernes quand on les compare aux guerres « d’autrefois »…

 

  1. En clair : récupérer les éventuels survivants et détruire cette source de matériel potentiel pour l’ennemi.
  2. La fameuse « Medal of Honor », rappelez-vous Courage under Fire (Edward Zwick, 1996).
  3. Citation douteuse du philosophe dont on retrouve difficilement quelque trace dans son œuvre. Par contre, McArthur (le général) la lui a attribuée dans son discours d’adieu à West Point (1962).
  4. De même nature que la « guerre inutile ».
  5. De nom essentiellement : l’armée américaine avait une liberté d’action qui allait au-delà de ramener la paix dans ce pays, comme le montre le film.
  6. Comment justifier un tel acte ? On ne peut pas.
Commenter cet article

Articles récents

Hébergé par Overblog