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Le Monde de Djayesse

Le Monde de Djayesse

Un peu de tout : du cinéma (beaucoup), de l'actu (un peu) et toute cette sorte de choses [A bit of everythying: cinema (a lot), news (a little) and all this kind of things]

Publié le par Djayesse
Publié dans : #Cinéma, #Muet, #John H. Collins, #Comédie dramatique
Blue Jeans (John H. Collins, 1917)

FA-BU-LEUX !

 

Nous sommes fin 1917 quand sort le film, et pourtant, nous avons l’impression d’être dix ans plus tard, tant ce film est réalisé d’une main de maître par John H. Collins, un réalisateur aujourd’hui oublié (1). Il faut dire qu’il fut l’une des millions de victimes de la grippe espagnole et mourut l’année suivante, à même pas 29 ans.

 

Il y a dans ce film une maturité et une utilisation des techniques cinématographiques des plus habiles et pertinentes. On y a recours à des flashbacks introduits par de très beaux fondus enchaînés (et de même quand on en sort), ainsi qu'à des gros plans magnifiques sur les visages ou sur des détails en plans de coupe, avec des intentions variées: accentuation de sentiments ou d'émotions, ou encore afin d'annoncer ce qui va suivre (dans la bagarre finale par exemple).

 

Mais reprenons.

Junie (Viola Dana – Mrs Collins à la ville) est une jeune vagabonde, seule, vêtue d'une salopette (2) trois fois trop grande pour elle. 

Perry Bascom (Robert Walker) se rend à Rising Sun (« Soleil Levant » : ça a de l’allure), où il va reprendre la scierie du beau-frère de son père, l’infâme Jack Bascom (Augustus Philips). Ce dernier y a laissé une odeur de soufre puisqu’il est parti avec une jeune femme du pays qu’il a ensuite lâchement abandonnée, avec un enfant.

Junie et Perry se rencontrent et décident d’aller ensemble à Rising Sun. Il reprend donc la scierie (après avoir changé de nom), pendant qu’elle s’installe chez un couple de vieilles personnes qui ont perdu leur fille partie avec un étranger (3).

Dans le même temps, dans cette même ville, Ben Boone (Clifford Bruce, qui suivra Collins et mourra un an après), le magnat du coin veut contrôler la scierie (un ennemi, donc).

Ajoutez à cela le débarquement (le mot n’est pas trop fort) de la belle et insidieuse Dora Endaly (Sally Crute) qui annonce – en pleine élection – qu’elle est la vraie femme de Bascom et vous aurez un mélo des plus compliqués dû, en partie à la célèbre June Mathis qui adapta avec Charles A. Taylor une pièce de Joseph Arthur (on a connu June Mathis moins compliquée dans ses scénarii).

 

Résumer l’intrigue est très difficile – voir plus haut – car ce sont des événements qui s’accumulent pendant la première moitié du film (et même un peu au-delà) pour notre duo de vedettes, amenant des situations qui ne sont pas sans rappeler les mélodrames de Griffith.

Mais comme le souligne mon ami le professeur Allen John, Collins ne se contente pas de ce genre d’histoire et désamorce rapidement ce qui aurait pu nous ramener à Way down East, par exemple (la jeune femme seule avec son bébé).

Et ce qui fait la force de l’intrigue, ce sont les différents interprètes. Viola Dana et Robert Walker, bien sûr, mais le couple de méchants – Clifford Bruce & Sally Crute – est des plus haïssables et donc magnifique (4). Mais les grands-parents eux aussi ont un rôle déterminant, même si leur statut est un tantinet trop coïncident. Et je pense surtout à l’immense Russel Simpson – acteur récurrent de John Ford – dans le rôle du patriarche meurtri par l’histoire de sa fille, et qui cette fois chasse sa petite-fille de chez lui, dans une scène des plus belles :

  • D’un côté Junie qui regarde son grand-père avec défi et lève les yeux vers lui ;
  • De l’autre le vieil homme qui baisse le regard vers sa petite-fille pendant que la caméra se place derrière lui pour nous proposer une plongée vers elle, accentuant l’ascendant du tyran familial.

 

Cette rencontre est l’une des nombreuses fois où  Collins demande à la caméra de John Arnold et/ou William H. Tuers des cadrages particuliers : gros plans très rapprochés des visages et surtout des yeux, plans de coupe amenant une tension grandissante pendant l’affrontement final.

 

Cet affrontement montre alors c e qui allait devenir un classique du suspense dans une scierie : le héros inconscient qui est placé sur le plateau qui s’approche de l’immense scie électrique…

Un grand moment de cinéma encore une fois.

 

A nouveau, je rejoins mon ami le professeur Allen John et vous invite fortement à voir ce film – malgré son scénario un petit peu trop compliqué – d’un réalisateur aujourd’hui oublié et qui pourtant savait faire du cinéma.

Par contre, la copie que j’ai pu visionner n’est pas dans un état des plus formidables et il arrive que la pellicule soit (irrémédiablement) abîmée, rappelant parfois les films psychédéliques, la musique en moins…

Qu’importe, le film est absolument magnifique !

 

  1. Pas de tout le monde, heureusement, mais sa courte vie le rend tout de même obscur.
  2. D’où le titre : la matière de cet immense vêtement.
  3. C’est bon ? Vous avez compris que c’était ses grands-parents ?
  4. C’est toujours pareil : un film ne peut pas être réussi si les méchants sont quelconques.

 

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