François Perrin (Patrick Dewaere) est en prison pour viol : il aurait, de nuit, agressé une jeune femme (France Dougnac) et a été formellement reconnu par deux témoins : Brochard (Michel Aumont) & Lozerand (Paul Le Person). Déjà qu’il avait été viré du club de football pour un contact avec Berthier (Patrick Floersheim)… Et comme le club appartient au patron de l’usine de la ville, Sivardière (Jean Bouise), il s’est en plus retrouvé au chômage. Alors si en plus on lui colle un viol sur le dos, qui ira se plaindre ?
Seulement voilà, lors d’un déplacement, plusieurs joueurs sont blessés et ne peuvent pas jouer. La mort dans l’âme, Sivardière s’arrange pour faire jouer Perrin. Pas de chance : il marque les deux buts de la victoire.
En attendant le match retour, pendant six jours, Perrin est « le patron de la ville ».
C’est à nouveau une comédie (très) grinçante que nous propose Annaud pour son deuxième long-métrage. Après la (drôle de) guerre, c’est le milieu du football amateur qui est pris pour cible. Et surtout ses dirigeants, en la personne d’une bande de notables dont la mesquinerie n’est pas sans rappeler celle des colons dans son film précédent. Et parmi eux, la palme revient au président du club, interprété par un Jean Bouise magnifique. Sa mèche qui recouvre impeccablement son front donne le ton : on devine une calvitie naissante non assumée par cet entrepreneur cynique.
Autour de lui, les autres gens importants qui constituent les possédants de cette ville n’ont rien à lui envier. Entre Brochard et Lozerand qui n’hésitent pas à faire un faux témoignage pour accabler Perrin, et Berri (Maurice Barrier) qui vire ce dernier comme un malpropre, nous avons toute une gamme de « petits bourgeois » méprisables.
Et au milieu de ce microcosme malsain, François Perrin (1). Patrick Dewaere campe un buteur (très) occasionnel avec beaucoup de force et de conviction – même s’il était un très piètre joueur – donnant à son personnage la dimension adéquate : Perrin est avant tout un pauvre type, qui est toujours là au bon moment mais pas obligatoirement au bon endroit. Et ces deux buts providentiels pour le club le deviennent automatiquement pour lui : voilà vingt-sept ans qu’il galère dans cette ville qui le traite comme un moins que rien, alors il est temps qu’il prenne sa revanche sur tous ces mesquins.
Parce que le sel de l’intrigue, ce n’est pas comment on en arrive là (la première partie du film), mais bel et bien ce que sa nouvelle position lui apporte. Outre les avantages en nature – gazinière moderne (four à double épaisseur) et autre voiture de démonstration (« de clown ») – il devient un intouchable en attendant la deuxième manche au football. Et il va en profiter à sa manière, prévenant ceux qui le méprisaient que les choses vont changer, au cours d’un repas – à ses frais – mémorable. Surtout pour les autres… Quoique.
Et cette revanche va tourner à la vengeance, mais à la manière d’une bombe à retardement : à aucun moment il n’exécutera ce qui est attendu de lui, plongeant alors ses différentes victimes dans un état de frustration qu’on peut qualifier de jouissif. Jouissif pour nous spectateurs, mais très certainement aussi pour ce personnage non-conformiste qui, malgré le titre, ne fait rien sur un « coup de tête » !
Et si je vous dis qu’on plus, la fine fleur des seconds rôles (2) est là, vous ne pouvez que vous précipiter sur ce formidable film d’un réalisateur qui a préféré consolider sa place dans le cinéma français avant de s’attaquer à l’international.
A voir (et revoir) de toute urgence !
- Encore un : le scénario étant de Francis Veber, pas besoin de chercher l’origine du nom…
- Sauf Jean-François Zardi !