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Le Monde de Djayesse

Le Monde de Djayesse

Un peu de tout : du cinéma (beaucoup), de l'actu (un peu) et toute cette sorte de choses [A bit of everythying: cinema (a lot), news (a little) and all this kind of things]

Publié le par Djayesse
Publié dans : #Cinéma, #Documentaire, #Politique, #Gilles Perret, #François Ruffin
Debout les Femmes ! (Gilles Perret & François Ruffin, 2021)

Ca commence comme un film documentaire. Ca tombe bien, c’en est un. Il s’agit du parcours de François Ruffin pour faire adopter une loi sur les métiers qui ont tendance à être effacés par les gros sous : ceux qui créent du lien.

Lesquels ? Auxiliaire de Vie Sociale (AVS), Accompagnant des Elèves en Situation de handicap (AESH), Animatrice périscolaire, Femmes de Ménage... Bref, tous ces métiers que notre cher président a mis un jour (pas un de plus) en évidence alors que le covid faisait rage et que le pays tournait au ralenti. Six mois après les annonces de cette même personne, au moment de faire véritablement un geste pour elles, la proposition de loi présentée est mise de côté, confirmant le peu d’intérêt de « la France d’en Haut » pour la « France d’en bas ». (1)

 

Au départ de cette initiative, on trouve François Ruffin, à qui on a acoquiné un personnage qui n’a que très peu de rapport avec lui : Bruno Bonnell. Si Ruffin est un chantre de la gauche, Bonnell est plutôt de l’autre côté du miroir (2) out tout du moins de l’autre côté de l’échiquier politique : chef d’entreprise macroniste (est-il besoin de développer plus ?)… On ne peut rêver meilleur contraire.

Sauf que cette association fonctionne, et au-delà de ce qu’aurait pu rêver Ruffin – et le spectateur déjà conquis par ce dernier (3) – Bonne nous démontrant (avec bonheur) qu’il a quand même une fibre humaine développée malgré ses sorties préalables (Ruffin les exprime dans le film), même s’il reste tout de même dans un registre différent de celui de son acolyte occasionnel.

Parce que réussir à accorder deux visions aussi différentes de la société est une sacrée gageure. Mais comme ledit M. R., à partir du moment où l’élément humain entre en ligne de compte, les différences politiques ont tendance à disparaître.

 

Nous allons donc suivre l’évolution de cette mission parlementaire qui repose sur ces deux hommes, en vadrouille dans les Hauts de France (Dieppe, Amiens), sur des terres ruffinesques, quoi, rencontrant les acteurs de ces métiers de lien social comme l’aurait voulu reconnus ce duo atypique. On va donc suivre des rencontres autour d’une table avec les personnes concernées par ces métiers, des déplacements chez des « vrais » gens qui n’ont parfois que ces aides de vie sociale et on se rend tout de suite compte d’une chose : ce sont avant tout des femmes qui sont concernées. Les rares hommes que nous voyons sont des élus, si ce ne sont pas ceux qui ont fait le film. Et encore une fois, on ne peut que regretter que ces métiers – mal payés, cela va de soi – sont encore réservés aux femmes, accroissant encore plus la différence de traitement homme/femme, avec évidemment des revenus pour celles-ci qui ne sont pas là pour faire remonter la moyenne nationale.

 

Et Ruffin – qui coréalise le film, donc – s’appuie avant tout sur le discours – creux ? – du président à propos de ces métiers « oubliés » comme dit Bonnell (« exploités » dit Ruffin) que le chef de l’Etat a mis en évidence dans un de ses discours « covidiens ». Bien entendu, vous pouvez imaginer la suite : non seulement tous ces métiers ne seront pas reconnus à leur juste valeur, mais en plus, on n’évoluera pas vraiment.

Il n’en demeure pas moins que pendant un instant, on a laissé la parole à ces femmes exploitées (je ne suis pas complètement d’accord avec Bonnell), et surtout, on leur a permis, le temps d’un film, d’exprimer leur véritable ressenti quant à leur activité professionnelle.
Et ça fait du bien ! D’abord à elles, parce que ce n’est vraiment pas tous les jours qu’on les laisse s’exprimer – surtout sans limite – et aussi parce que cela nous permet, à nous, les nantis qui ont un travail (relativement) bien payé de à rendre la mesure de leur détresse, même si la plupart d’entre elles ne regrettent absolument pas leur choix.

 

Mais cette satisfaction personnelle ne peut que les desservir. Ceux qui décident, voyant leur satisfaction (modérée) n’auront pas tendance à faire un geste pour elles : elles sont heureuses, de quoi se plaignent-elles ?

Et c’est justement parce qu’elles ne se plaignent pas de leur sort qu’elles sont extraordinaires : elles font ce que beaucoup sont incapables de faire à leur place.

 

Et quel retour ont-elles eu à propos du discours de ce même président qui voulait qu’on les mette à l’honneur ? Rien. Ou presque. Les dernières images rendent compte des rares gratifications qu’elles ont pu avoir exceptionnellement.

Quant à la proposition de loi déposée par Ruffin et Bonnell, non seulement elle a été vidée de tout son sens en commission, mais les quelques amendements proposés in extremis ont bien sûr été rejetés (pour la plupart : le seul que nous voyons adopté l’est pour une bonne raison : il ne coûte rien). Vous comprenez, ça coûte cher tout ça, et il n’y a pas d’argent magique.

Pour les pauvres.

 

Un film à voir de toute urgence (sociale) !

 

PS : nous aussi, spectateurs, n’avons qu’on seule envie à la fin du film, de chanter avec elles cet hymne du MLF, adaptation du Chant des Marais, ô combien de circonstance : oui,  DEBOUT LES FEMMES !

 

  1. La formule n’est pas de moi…
  2. Vous remarquerez que je n’ai pas parlé de côté sombre…
  3. Pour les autres, allez sur le site de Les Echos (je ne vous mets pas le lien, vous l’avez déjà dans votre barre de favoris)…

 

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