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Le Monde de Djayesse

Le Monde de Djayesse

Un peu de tout : du cinéma (beaucoup), de l'actu (un peu) et toute cette sorte de choses [A bit of everythying: cinema (a lot), news (a little) and all this kind of things]

Publié le par Djayesse
Publié dans : #Cinéma, #Biopic, #Christian de Chalonge
Docteur Petiot (Christian de Chalonge, 1990)

25 mai 1946 : le docteur Petiot est guillotiné pour avoir tué 27 personnes dont 15 Juifs pendant la guerre, entre 1942 et 1944.

Ce sont les deux années d’activité de ce docteur monstrueux que montre le film de Christian de Chalonge, offrant à Michel Serrault l’un de ses rôles les plus emblématiques et certainement l’une de ses prestations les plus impressionnantes.

Dès l’ouverture, Chalonge nous prévient : ce n’est pas la véritable histoire, mais elle est tout de même très inspirée de ce qui a défrayé la chronique à partir de la découverte du charnier jusqu’à son arrestation : Petiot était un tueur en série redoutable, dont les pratiques rappellent un autre criminel du même acabit : Landru. D’ailleurs, la découverte du repaire de Petiot est aussi un clin d’œil au film éponyme de Chabrol (1963) : on y voit deux cheminées qui fument, comme c’est le cas de façon récurrente dans ce film. Mais alors que celle de Landru va juste un tantinet indisposer son voisinage, celles de Petiot vont participer à sa chute.

 

Dès la séquence d’ouverture, le ton est donné : nous sommes au cinéma. Avec Petiot. C’est un film d’horreur dont le personnage principal n’est pas sans rappeler Nosferatu (Max Schreck). Et Petiot va entrer dans le film puis ce film s’intégrer avec bonheur dans celui que nous voyons, nous spectateurs, passant d’un noir et blanc (le film que Petiot est allé voir) à la couleur (notre film) en  douceur grâce à un décor qui n’en possède pas beaucoup (de couleurs). On y découvre alors un petit docteur somme toute bien gentil, un brin kleptomane, et qui semble engagé dans la Résistance. Bien sûr, le spectateur averti va sans cesse rapprocher ce qu’il voit de ce qu’il sait, donnant à ce personnage la teinte ignoble qui le caractérise.

Et comme je l’écrivais plus haut, Serrault est phénoménal dans ce rôle de personnage abject, moitié génie et moitié fou, capable de tuer de sang-froid ses victimes tout en veillant avec tendresse sur une petite fille malade dont les parents sont pauvres.

 

Il y a constamment une dualité tout au long du film, de par son personnage central, bien entendu, mais aussi dans la façon de filmer : on n’est jamais complètement sûr de ce que l’on voit. En effet, Chalonge use d’artifice pour mêler des images qui semblent tout droit sorties de son imagination, créant une sorte de rêve éveillé, dont on en voit pas toujours les limites : les vaches le long de la voie ferrée alors que Petiot passe sur son vélo, et bien sûr sa cape qui s’envole derrière lui quand il roule, lui donnant une allure d’oiseau de proie (ce qu’il est précisément) ou de menace de type Fantômas.

Et, à l’instar de l’esprit de ce Petiot, de nombreux décors sont désolés, voire partiellement détruits, accentuant l’aspect sordide de l’intrigue : ce sont de nombreuses vitres brisées, des ruines plus ou moins debout, qui donnent en outre un aspect atemporel à cette histoire. Et d’une certaine manière, on ne peut pas vraiment dater les décors (« extérieurs) tant les lieux sont eux-mêmes atemporels : ce sont même des édifices toujours visibles de nos jours.

Evidemment, Chalonge nous ramène toujours à sa réalité (nous sommes au cinéma, ne l’oublions pas) avec les différents costumes et allures des personnages montrés qui recréent cette époque trouble, sans pour autant qu’il y ait beaucoup de soldats allemands.

 

Et puis il y a Michel Serrault. Son allure hirsute traduit très bien l’esprit dérangé de ce personnage malsain. Et ce personnage est accompagné de musique, qui donne un rythme à ses assassinats : le tango. Sous couvert de faire passer ses victimes en Argentine, il leur passe un disque de cette danse, et cette musique va donner la cadence pour ses activités de pillage. Ce détrousse ment musical ajoute à la folie du personnage, comme envoûté par une mélopée exotique qui s’empare de lui et le dirige.

Et d’une manière générale, Serrault donne une image de son Petiot qui va au-delà des photos de ce criminel : on sent percer en lui, du fait d’un regard plutôt torve mâtiné de folie, ce qui a pu être la nature maléfique de son modèle. Sans oublier son rire qui parachève d’en faire un homme très inquiétant et surtout dangereux.

 

Je terminerai par le bruit qui accompagne Petiot à longueur du film et qui revient très clair à nos oreilles à différent »es reprises : il s’agit d’une lame qu’on aiguise. Mais une question peut se poser à ce propos : est-ce la lame qui va découper ses victimes afin de les enfourner plus facilement ? Ou celle du couperet qui mettra définitivement un terme aux agissements de ce tueur ? On pourrait penser à la deuxième proposition, surtout quand on voit ces gens qui lèvent les yeux alors qu’on annonce l’exécution. Mais c’est une fausse piste, un leurre.

Tout comme la vie de cet odieux docteur.

Marcel Petiot

Marcel Petiot

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