12 ans, c’est long.
Très long.
Alors quand Domingo « Dom » Hemingway (Jude Law) sort de prison après ces années, il a bien l’intention de passer à l’encaissement chez Ivan Anatoly Fontanov (Demián Bichir), le « parrain » pour lequel il a gardé le silence.
Bien entendu, ce dernier est prêt à rétribuer ces années de silence. Avec un petit bonus, en plus.
Sauf que tout ce gentil monde roule dangereusement et qu’un accident – si vite arrivée, c’est bien connu n- arrive. Et avec la disparition de son « protecteur », Dom doit en plus assister à la disparition de son pactole.
Et comme si cela ne suffisait pas, sa femme est morte et sa fille ne veut plus lui parler.
Il serait temps que la chance tourne…
Dom Hemingway, c’est un truand à l’ancienne. Et au XXIème siècle qui est en outre technologique, il n’est plus à la page. Il a beau essayer, il n’est pas capable d’une mise à jour : les règles ont changé, et les gangsters n’ont plus d’éthique. Tout se perd dans la vieille Angleterre, que voulez-vous.
Dom est un homme du passé : son séjour l’a complètement déconnecté (c’est le cas de le dire) de la réalité sociétale. Et pis que cela : on ne peut plus fumer dans les pubs !
Vous l’aurez compris, il y a dans le personnage de Dom Hemingway un mélange de sérieux et de parodique, nous montrant un homme comme on n’en fait plus (1). Lui et son ami Dickie (Richard E. Grant, fabuleux lui aussi en truand manchot) sont deux dinosaures dans un monde sans cesse en mouvement. Mais si ces deux complices semblent hors du temps (normal quand on sort de prison, un peu moins quand on n’y est pas allé) de par leur apparence, il est difficile de dater le temps du film.
En effet, si nous avons passé l’an 2000, comme le suggère un feu d’artifice géant, il manque l’accessoire indispensable de ce nouveau siècle : le téléphone portable. Non seulement personne n’en possède un, mais aucun téléphone n’est utilisé pendant tout le film !
Mais là n’est pas le plus important.
Ce qu'on retient surtout du film, c’est le personnage de Dom, décalé, mais magnifiquement truculent. Parce que ça trucule…
De l’ouverture qui voit le haut du corps de Jude Law pendant une fellation (2), faisant le panégyrique de son sexe, à l’ouverture du coffre fort, nous avons un véritable numéro d’acteur.
Jude Law est extraordinaire : du début à la fin, il nous montre l’étendue de son immense talent : malgré la vulgarité de son personnage, il arrive à nous émouvoir. Il faut dire que Hemingway, tout comme son homonyme littéraire, est un personnage hors du commun.
Son apparence qui semble sortir tout droit des années 1970, voire avant, détone complètement des rôles qu’on a l’habitude de le voir jouer : s’il reste britannique jusqu’au bout des rouflaquettes (3), n’en demeure pas moins un barbare hirsute, malgré son doigté incroyable. Nous sommes loin d’un docteur Watson, essayant de garder sa lèvre supérieure bien rigide en toute circonstance. De plus, un régime grossissant sévère accentue son côté « brutish », à défaut d’être british !
En prime, la présence – très remarquée maintenant – d’Emilia Clark, dans le rôle d’Evelyne, la fille de Dom. Pas évident d’avoir un père pareil. Mais après avoir joué Daenerys Targaryen, on peut tout jouer, non ?
- C’est peut-être aussi bien ainsi.
- En prison, ce qui amène une première réaction d’étonnement…
- « Mutton chops » serait plus juste.