Petit, comme beaucoup, j’avais appris le poème de Robert Desnos, La Fourmi :
« Une fourmi de dix-huit mètres avec un chapeau sur la tête,
Ça n’existe pas, ça n’existe pas. […] »
Ce poème, après une liste de choses semble-t-il impossibles se termine par un dernier vers rempli d’espoir : « Et pourquoi pas ? »
Ici, on pourrait facilement paraphraser le grand Robert en énonçant :
« Un éléphant qui vole avec l’aide de ses oreilles,
Ca n’existe pas, ça n’existe pas !
Et pourquoi pas ? »
C’est le parti qu’avaient pris Disney en 1941 quand le petit éléphanteau (pléonasme ?) était apparu sur les écrans grâce aux pattes magiques de John P. Miller, Martin Provensen, John Walbridge, James Bodrero, Maurice Noble & Elmer Plummer (1).
Et c’est ce qu’a confirmé Tim Burton à son tour en réalisant ce très beau film mélangeant images de synthèse et prises de vues réelles, exclusivement coloré (2), porté par la musique enchanteresse de Danny Elfman (3).
C’est à nouveau une histoire hautement improbable que Burton filme ici, mais avec le savoir-faire qu’on lui connaît – mais qui n’a pas toujours été au rendez-vous par le passé, hélas – et la dose indispensable de réalisme qui nous fait accroire finalement que « pourquoi pas ? »
Bien entendu, on pense à Big Fish, qui se passe lui aussi dans un cirque et cela est renforcé par la présence de Danny de Vito (Maximilian Medici) à nouveau directeur de ce petit monde.
Et avec Danny de Vito, ce sont d’anciennes connaissances du monde de Burton qu’on retrouve tout au long du film : Eva Green (Collette Marchant), Michael Keaton (V.A. Vandervere), Alan Arkin (J. Griffin Remington) n’en sont pas à leur première collaboration avec le réalisateur.
Dumbo se situe dans une tendance Disney à adapter ses dessins animés en images réelles : après La Belle et la Bête ou encore Le Livre de la jungle, c’est au tour de ce « grand classique » d’être adapté avec les limites habituelles. Comme le disait Tex Avery, on peut tout se permettre dans un dessin animé. Beaucoup moins dans un film en images « réelles ». Et Tim Burton nous prouve que les deux peuvent s’accorder et donner un très beau résultat. Certes, la part merveilleuse subsistant concerne le vol de l’éléphanteau. Faire parler les animaux aurait été complètement incongru et n’aurait pas eu l’effet escompté : on n’aurait pas pu vraiment y croire. Il reste toutefois quelques emprunts au film de 1941 comme l’œil de la mère à travers la fenêtre du wagon ou la séquence entre Dumbo et cette même Jumbo avec leur échange de caresses de trompes (4).
Mais comme on ne pouvait adapter totalement le film de 1941, il a fallu créer de nouveaux personnages : les enfants sont à l’honneur – Disney oblige – mais et surtout ce sont de véritables méchants qui apparaissent, ingrédients indispensables à la réussite d’un film.
Le premier, c’est Rufus Sorghum (Phil Zimmerman), un homme de cirque au fouet facile et qui voit – justement – sa méchanceté se retourner contre lui. Mais c’est son caractère mauvais qui va entraîner l’intrigue principale du film : Dumbo ne va voler qu’à la condition d’être réuni avec sa mère une fois le cirque renfloué.
L’autre, c’est V.A. Vandervere qui confirme le passage du côté obscur de Michael Keaton après Spider-Man : Home coming. A nouveau, on a une illustration de la théorie qui veut que les acteurs américains passent de l’autre côté (le côté sombre !) en vieillissant.
Et pour notre plus grand plaisir, Keaton est à la hauteur (pouvait-il en être autrement ?), devenant un autre méchant qu’on aime détester.
Avec Dumbo, Burton confirme son retour au premier plan qui avait été amorcé avec Big Eyes et conforté par Miss Peregrin’s Home for peculiar children, sortant de son univers sombre et gothique qui fit sa réputation (5). ON y respire plus librement, sans pour autant y perdre du point de vue merveilleux.
Tant mieux (pour nous !).
PS : n’y a-t-il que moi qui trouve que la mère des enfants qu’on peut voir sur une photo ressemble (beaucoup !) à Thandie Newton, la mère de Nico Parker ?
- Choisissez le bon. Une suggestion, professeur Allen John ?
- Aucun costume seulement noir et blanc !
- Toujours fidèle au rendez-vous.
- Pas terrible comme expression…
- Merci professeur Allen John.