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Le Monde de Djayesse

Le Monde de Djayesse

Un peu de tout : du cinéma (beaucoup), de l'actu (un peu) et toute cette sorte de choses [A bit of everythying: cinema (a lot), news (a little) and all this kind of things]

Publié le par Djayesse
Publié dans : #Cinéma, #Yves Boisset, #Drame

Le cinéma d’Yves Boisset n’est pas spécialement délicat.

Dans les années 70, il faisait du cinéma engagé. Il dénonçait. Il a toujours dénoncé. Et c’est efficace.

Ici, c’est l’ordinaire qu’il dénonce. Les gens ordinaires, le racisme ordinaire, la connerie ordinaire.

Dans la première heure du film, il dresse un portrait de la société française assez juste à travers les différents vacanciers dans un camping du sud de la France. Et en particulier l’un d’eux : Georges Lajoie, restaurateur, enfin plutôt tenancier de bistrot. Un bistrot bien français, où on boit français, on pense français, on a la cuite française. Et bien sûr, on a son franc parler. Surtout sur les étrangers, et encore plus s’ils sont un peu bronzés.

 

En vacances, monsieur Georges retrouve ses amis : Colin, qui vend des soutiens-gorges sur les marchés, et Schumacher, un huissier de justice. Malgré leur diversité sociale, ils se fréquentent depuis longtemps. Ils s’entendent très bien ensemble. Ils boivent le coup ensemble. Ils passent ensemble des vacances ordinaires.

Ils ont aussi des idées sur les « étrangers » assez similaires. Sur les étrangers en général, mais sur les Arabes en particulier. Rien de bien méchant, n’est-ce pas, mais chacun chez soi tout de même. Et là, on est dans le racisme ordinaire.

Un jour, Georges tente de violer la fille de Colin. Elle refuse. Il la tue. Et c’est là que commence la connerie ordinaire.

Rapidement, des ouvriers – dois-je préciser qu’ils sont d’origine algérienne ? – sont soupçonnés. Et comme la police ne va pas assez vite, les braves Français décident de lui donner un coup de main.

Résultat : un baraquement mis à sac, un blessé grave, un mort.

Mais comme le dit le substitut de la République : « des histoires comme ça, on en a trois pas mois… »

L’enquête est confiée à l’inspecteur Boulard (Jean Bouise, épatant). Boulard, c’est le porte-parole de Boisset. Il ne veut pas étouffer l’affaire. Il dénonce ce climat de racisme ordinaire et la lâcheté des pouvoirs publics par rapport à ces événements.

Mais il faut aussi vivre. Alors, en fin de compte, il étouffe l’affaire. Il sera commissaire. Mais il résume très bien la situation : « Du point de vue personnel, je trouve ça dégueulasse. Mais du point de vue professionnel, je m’exécute. » Mais on sent tout son dégoût dans cette décision de justice (on dirait aussi « parodie »).

 

Et les racistes ordinaires ?

Lajoie (Jean Carmet). Le personnage central. Le veule. Il parle beaucoup, et laisse agir les autres. Il n’a un bâton en main qu’une fois l’homme mort. Et quand il en parle dans son café, ce n’est plus une meute déchaîné qui se rue sur cinq pauvres types désarmés ? Ce sont trois quatre justiciers contre une horde de barbares. Pas étonnant que son fils s’en éloigne.

Colin (Pierre Tornade). Le père de la jeune fille tuée. Il a des circonstances atténuantes, sa fille est morte. Il est même prêt à se dénoncer mais les autres l’en dissuadent. C’est peut-être le plus humain de cette bande.

Schumacher (Michel Peyrelon). L’huissier de justice. Le notable. Le respectable. Mais aux idées extrêmement nauséabondes. Idées courtes, bien entendues, distillées avec sa diction impeccable et si particulière. Pour citer Napoléon à propos de Talleyrand : « de la merde dans un bas de soie. »

L’ancien d’Algérie (Victor Lanoux). Parce qu’il y en a toujours un dans ces situations-là. C’est le bras armé de cette justice. C’est lui qui incite et excite les autres. Il se recrée son Algérie. Il se venge d’une victoire qu’il n’a pas pu avoir. Lanoux est, là encore, formidable.

Les autres. Les pauvres cons qui se laissent entraîner et paraissent le regretter. Les plus dangereux, parce qu’on ne les distingue pas.

 

Quarante ans après, je ne suis pas sûr que les mentalités aient beaucoup évolué.

 

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