Avec Fanny, Pagnol continue l’histoire amorcée dans Marius. Après Korda, c’est Allégret qui se charge de la mise en scène. Le film démarre exactement là où se terminait le précédent : la Malaisie s’en va, Marius à son bord.
Autant Marius avait la légèreté des comédies de l’époque, autant Fanny se teinte d’une gravité intéressante.
Le départ de Marius a laissé des traces, surtout sur Fanny. Et cela va se voir dans les mois qui vont suivre. Elle doit épouser quelqu’un ! (nous sommes en 1932, l’amour et les mentalités n’étaient pas très libres)
Alors Panisse va se dévouer. Faible sacrifice, comme il l’explique à sa future femme.
Et Marius ? Il navigue, envoyant quelques lettres lors de ses escales.
Dans ce deuxième opus, nous retrouvons les mêmes personnages, dans des attitudes et des situations similaires avec toujours ces dialogues savoureux récités par ces mêmes acteurs hauts en couleur.
Mais ce qui transparaît, dans cette partie, c’est l’égoïsme.
Tous les personnages concernés par l’état de Fanny ne pensent qu’à eux.
- Panisse voit l’occasion d’avoir un fils et une descendance, ainsi qu’une jeunesse dans son lit.
- Honorine voit son honneur être sauvé et l’argent de Panisse est un autre stimulant.
- César, après avoir défendu son fils (le père biologique), se range à l’avis des autr’es, avec la promesse d’être le parrain de cet enfant.
- Marius, en déplacement dans la région, réclame la mère et le petit, faisant l’impasse sur son absence et son silence envers Fanny.
Et Fanny, dans tout ça ? Elle se laisse faire. Malheureuse de la situation, mais aussi apeurée de se retrouver abandonnée de sa mère après l’avoir été de son amant.
Et puis il y a Marseille. L’éternel port, avec son rythme lent. Avec son tramway qui est arrêté par la traditionnelle partie de pétanque. [Uderzo et Goscinny reprendront cet épisode dans Le Tour de Gaule d’Astérix]
Les personnages gagnent aussi en épaisseur – sauf César, bien entendu, il n’en avait pas besoin !
César n’est plus le centre de l’attention, même s’il continue à se considérer comme le centre du monde.
Monsieur Brun – le Lyonnais – après avoir rembarré César dans Marius, se permet de remettre les autres à leur place lors de la scène de la lettre. Et Panisse prend plus de place dans l’intrigue.
Encore une fois, les esprits s’échauffent vite et la colère s’empare des protagonistes à la moindre occasion. C’est avec Honorine qu’elle est la plus cocasse : elle passe des gémissements à la fureur, selon que sa fille est évanouie ou éveillée.
En prime, une scène franchement drôle : Monsieur Brun veut acheter le bateau Pitalugue à Panisse alors que César fait tout pour l’en dissuader.