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Le Monde de Djayesse

Le Monde de Djayesse

Un peu de tout : du cinéma (beaucoup), de l'actu (un peu) et toute cette sorte de choses [A bit of everythying: cinema (a lot), news (a little) and all this kind of things]

Publié le par Djayesse
Publié dans : #Cinéma, #Musique, #Dessins animés, #James Algar, #Samuel Armstrong, #Ford Beebe Jr., #Walt Disney
Fantasia (James Algar, Samuel Armstrong & Ford Beebe Jr, etc. - 1940)

Du grand art. Extraordinaire… J’arrête là, je n’aurai jamais assez de superlatifs pour louer ce film, véritable coup de maître des studios Disney, entraînés par un homme qui, s’il n’était pas toujours très fréquentable, n’en demeure pas moins une référence pour le dessin animé : Walter Elias Disney.

Parce qu’il fallait oser un tel film : faire découvrir des œuvres classiques à un public avide avant tout d’histoires merveilleuses comme l’ont prouvé les deux précédents longs métrages : Blanche-Neige et les 7 Nains et Pinocchio.

C’est un brusque virage qui est ici proposé parce que s’il reste quelques éléments narratifs dans certaines œuvres interprétées par l’orchestre de Philadelphie, dirigé par le grand Leopold (1), ce sont avant des images animées qui sont proposées aux spectateurs : réelles tout d’abord avec l’orchestre qui s’installe et le narrateur (Deems Taylor) qui présente, puis incorporant des dessins (animés, évidemment) qui rappellent cet orchestre jusqu’à laisser la place au travail des différents animateurs.

Sublime.

 

Et comme il s’agit d’un film musical, il faut avant tout l’assimiler à un concert. Unique en son genre, bien sûr, mais rien d’autre. Et le découpage va dans ce sens : avant et après chaque pièce présentée par Deems Taylor (2) nous voyons Stokowski lancer et/ou arrêter son orchestre. Et le décor choisi pour cet orchestre est lui aussi un coup de génie : il n’y a rien qu’un fond bleu (3) sur lequel se détache une estrade où prendra place Leopold. Cet absence de décor va totalement dans le sens du projet de Disney : promouvoir la musique. En effet, seules les images issues des cerveaux fertiles des animateurs viendront agrémenter cette musique. Et c’est peut-être là qu’il faut trouver le paradoxe de cette œuvre unique.

 

En effet, Taylor commence par expliquer le premier morceau (Toccata & Fugue en ré mineur de J-S Bach), annonçant que nous sommes dans un registre non narratif et que les images qu’on va y voir peuvent sortir de notre imagination. Mais c’est bien de celle de Samuel Armstrong qu’elle est issue, épaulé par son équipe d’animateurs. Donc, une imagination bridée pour le spectateur. Mais si ce n’est que le seul reproche qu’on peut faire au film, ça ne remet pas beaucoup de choses en cause : dans ce cas-là, toutes les adaptations d’œuvres (littéraires ou picturales) sur grand écran sont bridantes

 

C’est donc un extraordinaire film que nous proposent les studios Disney, véritable œuvre artistique à mi-chemin entre la peinture et le cinéma d’animation, comme en témoignent certains plans fixes qui introduisent ou concluent certains éléments musicaux. Sans oublier une utilisation de la lumière et de l’ombre qui atteint ici certains sommets esthétiques. C’est le cas pour l’extraordinaire Nuit sur le Mont Chauve de Moussorgski (avant-dernière œuvre présentée) ou encore les balais dans l’Apprenti Sorcier de Dukas, qui voit pour la première fois Mickey Mouse (voix de Walt Disney) dans un long métrage.

Ce segment est très certainement celui dont tout le monde se souvient, la présence du rongeur aux gants à quatre doigts y étant pour beaucoup. Et il est difficile, aujourd’hui encore, de dissocier cette œuvre de Paul Dukas du film.

 

Autre segment quia fait la renommée du film : les dinosaures. Ou plutôt le Sacre du Printemps de Stravinsky. Bien sûr, on ne se souvient pas d’une quelconque mélodie (4) mais cette odyssée dans le passé de la Terre a un aspect aussi grandiose que le furent ces créatures. Et tant pis pour la vraisemblance : que l’archéoptéryx cohabite avec le tyrannosaure (seulemnt90 millions d’années les séparent, un instant dans l’histoire de la Terre…) ne gêne personne, et c’est tout à fait normal, nous sommes au cinéma !

Autre élément purement cinématographique : la Danse des Heures (Amilcare Ponchielli). C’est un incroyable ballet qui nous est ici proposé par Norman Ferguson et T. Hee, mélangeant allègrement les codes du ballet classique. Si les autruches font des danseuse acceptables, surtout grâce à leur longues pattes postérieures, avoir fait des éléphantes et des hippopotames des ballerines est là encore sublime : non seulement elles vont à l’encontre de ce qui se faisait (et se fait encore) dans les corps de ballet, mais en plus, l’intrigue joue sur leur présence mastoc, les jeunes danseurs étant des crocodiles dont la silhouette longiligne tranche avec celles des pachydermes.

 

Bref, c’est un festival, pour les oreilles comme pour les yeux, qui fera date dans le genre, et hissera ce film parmi les meilleurs – le meilleur pour ma part – des studios Disney. Certes, les arrangements de Stokowski d »es différentes œuvres présentées n’ont jamais été du goût de tous, mais pour ma part, même si je préfère les « originales », elles se placent dans le même cadre que tout le reste : au cinéma, tout est possible. Et il ne faut pas non p^lus négliger leur impact sur le public qui à travers ce film a pu découvrir une musique qui était un tantinet tombée en désuétude avec l’avènement du jazz.

 

Le jazz, d’ailleurs, est tout de même présent dans le film : avant de reprendre – il y a un entracte, comme au concert – les musiciens qui sont revenus se délassent improvisant une musique aux résonances jazzy. Pourquoi cet intermède « moderne » dans ce répertoire « classique » ? J’aurai tendance à penser que c’est pour montrer aux spectateurs rétifs au programme proposé que tous ces musiciens à l’apparence guindée sont comme eux : ils aiment aussi se délasser en écoutant quelque chose de plus décontracté…

 

Fantasia ? Un classique. Dans tous les sens du terme !

 

  1. Stokowski (1885-1977) !
  2. Deems Taylor était un chantre américain de la musique classique, son promoteur outre-Atlantique. Pas étonnant que Disney lui ait demandé d’assurer la présentation des différentes œuvres.
  3. Je le suppose, étant toujours aussi daltonien…
  4. Encore que…

 

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