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Le Monde de Djayesse

Le Monde de Djayesse

Un peu de tout : du cinéma (beaucoup), de l'actu (un peu) et toute cette sorte de choses [A bit of everythying: cinema (a lot), news (a little) and all this kind of things]

Publié le par Djayesse
Publié dans : #Cinéma, #Guerre, #Mel Gibson
Tu ne tueras point (Hacksaw Ridge - Mel Gibson, 2016)

Mel Gibson nous revient avec un film de guerre plutôt singulier. En effet, après avoir filmé l’épopée – tragique – de Robert Bruce (Braveheart – ou s’être encore perdu dans les arcanes et surtout l’origine du christianisme – il nous propose ici un film de guerre en total accord avec le premier commandement (1) : « tu ne tueras point ». Ceci explique d’une part le titre français, mais surtout justifie le parcours de Desmond Doss (Andrew Garfield), objecteur de conscience et pourtant volontaire dans la seconde Guerre Mondiale.

 

Ce n’est pas la première fois que l’objection de conscience fait l’objet d’un film, mais après Howard Hawks (Sergeant York, 1941), qui voyait Gary Cooper refuser de tuer mais n’était pas contre le fait de se débarrasser d’ennemis légitimes, Mel Gibson ôte tout élément comique et nous propose ici un film de guerre des plus réalistes et authentiques, se basant sur l’expérience – et la vie – de Desmond Doss, qui a réellement vécu tout ça.

 

Alors que Hawks jouait sur l’ambigüité, Gibson ne fait aucune concession, et la seule fois où son héros a un fusil en mains, c’est pour créer un brancard de fortune, permettant au sergent Howell (Vince Vaughn) de se sortir de l’enfer de Hacksaw Ridge (le titre original) vivant.

 

Pourtant, Doss n’est pas un personnage des plus extraordinaires. Fils d’un ancien de la Grande Guerre, alcoolique (Hugo Weaving) – et donc violent – il se distingue par une bonté naturelle, et ce malgré la violence paternelle. C’est cette bonté qui lui fera rencontrer Dorothy (Teresa Palmer) et d’une certaine façon le poussera à s’engager dans l’armée américaine, avec la ferme détermination de ne jamais tenir en main une quelconque arme.

Et coup du sort, ou plaisanterie du destin, c’est son père, voir plus haut, qui lui permettra de jouir du statut décrié d’objecteur de conscience sans être taxé de lâcheté ou quelque qualification similaire et censée dégradante.

Bien sûr, la religion joue un grand rôle dans la conviction de Doss, mais sans pour autant faire du film un pamphlet religieux contre la guerre.

J’aurais même tendance à dire que ce film permet à deux conceptions totalement antinomiques de coexister : le fait que Doss refuse de porter arme(s) n’est pas incompatible aux assauts prévus.

 

Et c’est là, à mon avis que le bât blesse dans ce film.

Le dernier assaut, que nous ne verrons pas, Gibson choisissant – à juste titre – de terminer son film avant, prend en compte la différence de Doss, voire en fait d’une certaine manière une arme pour les soldats qui s’en vont mourir glorieusement pour leur pays (2) : l’assaut est différé afin de permettre à Doss de prier.

Et d’une certaine façon, on retrouve une situation des plus médiévales : Doss prie pour ceux qui n’en ont pas le temps, leur assurant de ce fait un quelconque salut, tout comme le faisaient les clercs pour les nobles guerroyant ou les paysans travaillant.

 

Je ne pense pas que Desmond Doss ait eu cette idée en tête quand il priait pour ceux qu’il allait éventuellement secourir, mais soixante-quinze ans après (environ) on ne peut s’empêcher d’y penser.

Quoi qu’il en soit, Mel Gibson nous livre un nouvel aspect de la guerre, allant beaucoup plus loin que Hawks. Il n’y a pas ici quelque élément comique dans la guerre de Doss, ce qui n’était pas vraiment le cas de York. Et cela ne vient pas du changement de conflit.

Gibson nous livre ici la guerre d’un pacifiste – un vrai – mais avec la conviction que ce sont ces gens qui peuvent réellement influer sur les conflits et – par extension – la bêtise humaine (ça, c’est de moi).

 

Oui, Desmond Doss fut un vrai héros. Mais pas un héros de guerre, un héros de la paix. On a l’habitude de considérer les soldats en héros quand ils ne reviennent pas du conflit.

Avec ce film, Mel Gibson nous montre qu’il existe d’autres héros, certainement pas célébrés part quelque chantre anonyme, mais tout de même indispensables voire responsables de la vie des autres, de ces anonymes – comme toujours – qui par leur action ont permis de sauver des vies, sans avoir pour autant à se salir les mains dans un tourbillon mortifère.

 

Pour une fois qu’un film de guerre glorifie (dans une certaine mesure, le terme est un tantinet fort) l’action de ceux qui sauvaient les autres, tut en sachant qu’ils pouvaient mourir aussi facilement qu’eux, on ne va pas bouder son plaisir…

 

  1. Tout du moins est-ce certainement le plus important.
  2. C’est ça, il me semble, la raison de mourir d’un soldat, non ?
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