Nous sommes quelques temps après le passage de l’ouragan Katherine (2005) et
Mais les langues ne se délient pas beaucoup dans cet état au passé chargé. Et cette affaire rappelle à Robicheaux une autre qui s’est déroulé une quarantaine d’années auparavant : l’acteur Elrod Sykes (Peter Sarsgaard) a découvert le corps d’un homme enchaîné. Cet homme que le jeune Robicheaux avait vu se faire abattre, de l’autre côté du marais où il se trouvait.
A première vue, pas de lien entre ces deux affaires.
Et pourtant…
Bertrand Tavernier était un très grand réalisateur. Avec ce film américain, il nous démontre qu’il est à l’aise partout, menant de main de maître ce projet – contre l’avis des producteurs – et dirigeant avec brio Tommy Lee Jones, qui s’est investi personnellement dans ce film. Et ça fonctionne très bien, Tavernier réussissant un film totalement américain, avec son propre savoir faire. Alors que les superproductions s’enchaînent rivalisant d’effets spéciaux numériques et de montages au rythme effréné, il reste dans un cinéma plus traditionnel et prend le temps de placer sa caméra, der filmer ses interprètes. Le résultat est superbe : un film efficace, halluciné où la violence – inévitable – n’est pas pour autant gratuite et surtout jamais racoleuse.
Il y a une parenté évidente avec Coup de Torchon, dans le rythme tout d’abord mais aussi dans le temps atmosphérique : si l’air n’est pas étouffant comme en Afrique, les intempéries restent très présentes et marquent le film de leur empreinte. Outre la tempête mentionnée ci-dessus, l’orage est un élément important de par sa violence (encore une) et le bruit qu’il amène, rappel des canons de
Et nous entrons en plein dans la psychanalyse puisque ces moments d’inconscience plus ou moins volontaire sont les moteurs de l’intrigue. C’est à ces moments-là que Robicheaux (toujours lui) &avance dans ses réflexions, aidés par ce général d’un autre âge qui l’assiste dans sa propre introspection : la solution est là, il « suffit » juste de bien regarder.
C’est un film un tantinet poisseux où se télescopent le passé et le présent, voire les passés : celui de 1965 et le lynchage en règle d’un homme noir ; celui de 1865 et avant et cette guerre fraternelle qui divisa un pays ; et celui encore avant, pendant l’occupation française, encore présente dans les différents patronymes des autochtones (Robicheaux, Doucet, Girard…) ou encore les enseignes Chez Narcisse et autres pancartes (Messieurs – Men).
Superbe.