Cloporte : petit animal arthropode (ordre des isopodes) qui vit sous les pierres, dans les lieux sombres.
Ici, les cloportes sont des truands à la petite semaine qui se prennent pour des Hommes. Alors évidemment, ça fait des dégâts…
Edmond « le Naïf » (Charles Aznavour), Arthur « Le Mou » (Maurice Biraud) et Joseph Gerhard dit « le Rouquemoute » ont en vue un petit casse. Malheureusement pour eux, ils n’ont pas un flèche à mettre dans la partie pour le matériel (chalumeau). Ils vont alors démarcher un vieil ami – Alphonse Maréchal dit « Le Malin » - afin qu’il finance l’opération, en lui faisant miroiter un magot un tantinet exagéré (juste 10 fois sa vraie valeur).
Mais comme ce ne sot que des demi-sels, le coup capote et Maréchal se retrouve à l’ombre pendant cinq ans, avec une seule idée en tête : retrouver les cloportes et régler les comptes…
Quand le film sort, nous sommes toujours sur la vieille vague, fustigée par ces messieurs des Cahiers, et malgré la qualité de la mise en scène, des dialogues et des acteurs, le succès fut mitigé.
Pourtant, plus de cinquante ans après, on célèbre avec gourmandise le moindre film où apparaît le titre Dialogue de Michel Audiard (1). Si Audiard a écrit les dialogues, il ne faut pas oublier Alphonse Boudard qui écrivit le roman dont est tiré le film, ni encore Albert Simonin qui signa ici l’adaptation.
Bref, nous sommes en compagnie de gens de lettres, ou plutôt de « bafouilles », chacun son style, que voulez-vous.
Et du beau monde, il y en a aussi sur l’écran. Outre le quatuor précédemment évoqué, on trouve quelques pointures du cinéma français, et pas des moindres : Pierre Brasseur (Démuldère dit « Tonton », allez savoir pourquoi…) ; Daniel Ceccaldi (l’inspecteur Lescure) et l’incomparable Françoise Rosay (Gertrude), celle qui fournit le matériel de toute sorte (chalumeaux, flingues, papier ?). Gertrude est bien évidemment une parente de Madame Pauline, fleuriste, dans Le Cave se rebiffe.
On peut même remarquer Jean Carmet, dans un petit rôle d’efféminé, « comme ils disent… » (2)
On retrouve donc autour de Ventura, truand raffiné mais tout de même bien naïf, certains partenaires du Taxi pour Tobrouk, la gravité du sujet (la guerre) étant mise au rancart, pour une comédie plutôt inhabituelle : ça ne se termine pas bien pour tout le monde. Mais ça n’a pas beaucoup d’importance, le jeu des acteurs et actrice (Irina Demick) nous faisant passer un moment très agréable. Irina Demick, d’ailleurs est une « belle conne » comme on pourrait dire, à une nuance près : si elle est très belle, elle est très loin d’être conne…
Et Max dit « Le Malin », est, pour sa part, bien loin de l’être : repassé une première fois par les autres cloportes, il aura droit à un deuxième service…
Quant aux trois affreux, ils sont plutôt gratinés. Si Edmond et Arthur peuvent presque passer pour des durs, il en va tout autrement du Rouquemoute. Géret interprète un personnage dont la veulerie et la lâcheté se marient très bien avec l’hypocrisie. Bref, c’est le pire de tous : pas étonnant que Ventura/Maréchal le garde pour la fin. Même quand il n’est pas là, et qu’on parle de lui, ce n’est pas en bien. En plus d’être petite frappe, il a tendance à se laisser entretenir par une drôle de paroissienne : Léone (Annie Fratellini). Bien qu’elle fasse le tapin pour l’autre oisif, elle choisit ses clients et refuse les vieux messieurs. Tout un poème.
Je terminerai par la réflexion de Mme Gertrude à propos du Rouquemoute, mais qui convient aussi aux deux autres : « Un mec qui t’emporte une brique de matériel, qui t’laisse deux cents sacs et qui donne plus jamais de nouvelles, moi j’appelle ça une mauvaise personne. »
- Encadré, s’il vous plaît !
- N’oublions pas qu’Aznavour est là.