Le vieux O’Day vient de mourir, laissant derrière lui une fortune immense qu’il lègue à son neveu Patrick. Larry Delavan (Harrison Ford), beau-fils du mort et héritier présomptif, voit alors ses espoirs de devenir riche s’envoler.
Malheureusement ce dernier malade ne peut se rendre en Amérique pour toucher son héritage. A sa place, le père O’Day (J.M. Kerrigan) débarque à New York avec son fils Pat. Ce dernier ressemble beaucoup à sa sœur Patricia (Marion Davies).
Delavan est désespéré, lui qui pensait faire fortune en investissant de l’argent dans une nouvelle invention : le steamer de Robert Fulton (Courtenay Foote).
Non, Marion Davies ne fut pas seulement la bonne amie de William Randolph Hearst. Elle fut aussi une actrice formidable, un tantinet méprisée pour ses relations intimes avec le magnat de la presse (1).
Pourtant, on ne peut pas ignorer son talent, la belle étant capable de jouer sur différents registres, dont celui de cette Patricia à la personnalité ambiguë.
En effet, le film joue essentiellement sur la personnalité double de Patricia : « Patrick » à la ville. Tout comme Mary Pickford deux ans plus tôt (The little Lord Fauntleroy), Marion Davies joue un jeune garçon. Mais si le rôle de Pickford était clairement masculin, le rôle de Davies est avant tout celui d’une fille (« a girl », révèle-t-elle) qui doit se comporter comme un homme ou plutôt un jeune homme. Et si ce rôle prête à l’ambiguïté, il n’en possède pas moins un aspect comique.
Le « jeune homme » se comportant peu de manière masculine : la séquence du bal est on ne peut plus parlante. Quant aux élans amoureux que Patricia a envers Delevan, il est obligé d’y mettre le holà, le jeune homme se comportant « comme une fille ».
Pourtant, c’est cette relation équivoque qui fait tout le sel du film. Et la conclusion – attendue – laisse tout de même planer un léger parfum de scandale pour 1923 : tout comme la pièce dont est issue l’intrigue, on sent une homosexualité latente dans les rapports entre Pat et Larry. En effet, Larry se dit satisfait que Pat ne soit pas un garçon : ressentait-il quelque désir pour ce jeune homme aux très si fins ?
Bien sûr, cette équivoque se perd dans l’issue heureuse, et de toute façon, il n’était pas question de lancer une quelconque polémique.
De plus, Marion Davis interprète avec sobriété ce personnage double, n’exagérant en rien tel ou tel aspect de sa personnalité.
Parmi la distribution impeccable, on a plaisir à voir certains personnages historiques qui ont beaucoup fait pour New York et l’Amérique. Outre Fulton on croise l’écrivain Washington Irving (Mahlon Hamilton) ainsi que quelques noms illustres des grandes et prestigieuses familles new-yorkaises : John Jacob Astor (Andrew Dillon) et Cornelius Vanderbilt (Sam Hardy).
De plus, Sidney Olcott recrée ce « Vieux petit New York » (2) avec beaucoup de bonheur – et ce malgré un incendie qui ravagea les studios mais laissa intacte le négatif – rappelant qu’avant d’être la mégalopole que nous connaissons, la ville était de taille raisonnable et les routes étaient essentiellement des chemins de terre (qui devenaient boueux avec l’humidité).
On y retrouve aussi quelques éléments qui seront utilisés par Walsh dans The Bowery : la brigade de pompiers possède son champion de boxe, ce qui nous permet de nous régaler devant un match fort disputé et qui aurait tendance à se terminer en émeute.
Olcott montre alors qu’il sait – lui aussi – diriger une foule et on atteint un sommet quand Pat, pour sauver Larry, se dénonce d’avoir truqué » le match. Elle est conduite par une foule en effervescence au pilori (ou au poteau juste à côté) pour y être fouettée. Cette scène n’a pas dû laisser les spectateurs de l’époque indifférents (surtout les hommes) : après quelques coups le bourreau – qui n’est autre que le boxeur (Louis Wolheim) - arrache une partie de la chemise de Pat (l’arrière), mais heureusement (pour la morale), elle avoue être une fille et le supplice cesse aussitôt.
Bref, encore une fois, une curiosité qui mérite qu’on s’y intéresse.
- Ce magnat fut pour beaucoup dans la déchéance de l’immense (dans tous les sens du terme) Roscoe Arbuckle.
- Le titre original.