James Bond revient. Encore.
Mais si Sean Connery fut un Bond plus qu’appréciable – malgré l’opus précédent – George Lazenby, grâce à Peter Hunt, nous offre de la quintessence de 007.
C’est le film des « 1 fois ». (1)
En effet, nous avons ici une aventure de Bond beaucoup plus personnelle. On pénètre dans une part de son intimité, sans toutefois déroger à la règle habituelle : neutraliser un adversaire psychopathe, bagarres diverses, poursuites (dont voitures, bien entendu) et James Bond girls à gogo. Elles sont 15 en comptant la plus importante : Teresa Tracy di Vincenzo (Diana Rigg, toujours éblouissante).
Parmi les 1 fois, on trouve aussi des premières fois : c’est la première fois que Bond pénètre chez M (Bernard Lee). La prochaine fois, ce sera Daniel Craig : un autre James Bond pour une autre M (Judi Dench). Mais ici, c’est avant tout la demeure familiale au vu de son ampleur.
On voit aussi Bond embrasser – très légèrement – Miss Moneypenny (Lois Maxwell) sur la bouche, dans une – indispensable – séquence au QG (Universal Exports Ltd, comme d’habitude aussi).
Mais surtout, c’est la première fois qu’il se marie. Véritablement. Dans l’épisode précédent, son « mariage » était faux, puisqu’il ne portait pas son vrai nom, et que ne ferait-on pour le service (2).
Mais c’est surtout James Bond que nous découvrons ici. Le vrai, l’être humain derrière la couverture d’agent secret. Certes, il possède toujours sa même adresse pour se sortir des situations, mais sa rencontre avec Tracy le transforme, doucement, progressivement, à mesure qu’il se rend compte qu’il aime cette femme si peu ordinaire : à un agent extra ordinaire, il ne pouvait pas correspondre une femme commune.
George Lazenby, éphémère James Bond rend son personnage absolument magnifique. Il conserve l’esprit et le rythme des films précédents et y ajoute une émotion rarement retrouvée ensuite.
Il y a un ton très personnel qui disparaîtra ensuite. Et cette émotion est accentuée par des flashbacks pertinents : des images de ses exploits passés quand il donne sa démission ; et surtout les dernières images qu’il garde de Tracy quand elle est enlevée, ces images se reflétant sur une vitre, alors qu’il regarde au dehors, sans vraiment rien voir.
George Lazenby n’a pas voulu renouvelé l’expérience. Certes le film n’a pas aussi bien marché que les précédents, mais je rejoins la plupart des spécialistes – dont mon cher ami le professeur Allen John – pour conclure que ce film est très certainement le meilleur de la série.
Mais je comprends un peu le choix de Lazenby : son agent lui avait prédit une baisse de l’intérêt des spectateurs dans ce personnage d’agent secret (comme quoi tout le monde peut se tromper), alors il lui fallait quelque chose de sûr.
Mais surtout, avec cette seule interprétation, il fige Bond dans un moment clé de sa vie. Cet épisode va prendre la teinte personnelle et émotionnelle qui en fait un film complètement à part dans la série.
C’est bien simple, tout ce qui peut arriver après n’est rien à côté de ce qu’il a vécu pendant ce seul épisode.
Jamais il n’y aura une telle intensité dans le personnage : ce sera la seule fois Bond dira « Je vous aime » à sa partenaire principale et, semble-t-il, définitive.
Définitive, car il n’y aura pas d’autre femme dans la vie de Bond. Tout du moins à ce niveau personnel. Les femmes s’enchaîneront inlassablement, mais aucune ne prendra la place de Tracy.
Tracy, d’ailleurs, mous permet d’admirer (4) Diana Rigg autrement, passant de Chapeau melon et Bottes de cuir à James Bond, en souplesse et en retrouvant les réflexes affutés de Mrs Peel : une autre très bonne raison de (re)voir ce film.
PS : j’oubliais, c’est la première fois que la réplique « My name is Bond. James Bond. » est prononcée dans son intégralité. Et encore une fois, ce n’est pas à n’importe qui mais à Tracy qu’il s’adresse !
PPS : Vous aviez remarqué Joanna Lumley, autre partenaire de Steed quelques années plus tard ?
- Je vous laisse user du terme « one shot ». Pour ma part, bien qu’angliciste et anglophile, je ne le trouve pas terrible. Les goûts et les couleurs…
- Voir à ce sujet Francis Lagneau, dit « Chérubin », dit « Falbala »…
- « Voir » n’est pas un terme assez fort quand on parle de Diana Rigg…