Une clôture grillagée avec un écriteau défendant l’entrée, ça vous rappelle quelque chose ?
Oui. Moi aussi. Mais cette fois-ci, c’est l’écriteau qui conclut la mini séquence (avant l’intervention des premiers personnages). Et au lieu de remonter le grillage, nous partons du haut pour aller tout en bas. Logique, c’est ici que se trouve l’ouverture – interdite, mais comme il y a un espace – par laquelle passent les deux premières victimes…
Déjà l’affiche nous prévenait : une baigneuse que regardent en contre-plongée des poissons aux dents aiguisées…
Oui, ça rappelle Jaws, mais attention : ce n’est pas Jaws !
Tout d’abord parce que ce n’est pas le même budget, et aussi parce que Joe Dante (réalisateur injustement méprisé) n’est Pas Spielberg.
Mais on retrouve tout de même quelques éléments du film précédent dans l’histoire de John Sayles (et Richard Robinson) :
- des baigneurs sont attaqués par des poissons furieusement affamés ;
- un événement à caractère aquatique a lieu en même temps ;
- le directeur, averti et conscient du désastre annoncé, refuse d’annuler les réjouissances ;
- les lanceurs d’alerte sont muselés (1).
Mais une fois les références écartées, on assiste tout de même à un film réjouissant (malgré le thème plutôt horrible), e-t qui n’est pas sans rappeler la manière de faire de Roger Corman.
C’est normal, c’est lui l’un des producteurs exécutifs qui a demandé au jeune Joe Dante de tourner cette histoire à mi-chemin entre la parodie et le film gore.
Alors on retrouve certaines de manières de faire de Corman, comme le bricolage, ici poussé à un haut niveau avec des spécialistes comme Phil Tippett, Rob Bottin et Phil Walas (2).
En outre, on retrouve Dick Miller (Buck Gardner, adepte précoce du recyclage), l’acteur fétiche du vieux réalisateur (92 ans cette année) et qui deviendra indispensable dans les autres films du plus jeune (« seulement » 72 ans).
Nous assistons donc à un va-et-vient constant entre la tragédie et la comédie, avec des morts qui se succèdent, le tout avec une dénonciation des pratiques militaires de la Guerre froide expliquée par le vétéran Kevin McCarthy, qui sera lui aussi dans plusieurs films de Dante. Et rythmé par quelques éléments comiques et des jeunes femmes dénudées.
Bref, c’est un film à grand spectacle mais à petit budget, où les scènes d’horreur sont nombreuses et impressionnante, rythmées par le bruitage des poissons (en caoutchouc, c’est moins dangereux) qui se ruent sur une proie pour la dévorer, avec en prime des attaques sur des enfants, ce qui est plus rare dans ce genre de films.
Au final, on passe un bon moment en regardant ce film assez surprenant. Spielberg lui-même fut agréablement surpris par le film, protégeant Dante des foudres de la Universal qui allait sortir un Jaws 2, et lui proposant même de tourner Gremlins quelques années plus tard.
(1) Comme quoi, ça ne date pas d’hier…
(2) Qui ont respectivement travaillé : sur les premiers Starwars et Indiana Jones (Tippett), avec John Carpenter (Bottin), ou encore sur La Mouche (Walas), pour ne citer que ceci. Pour le reste, allez voir sur IMdB ou ailleurs…