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Le Monde de Djayesse

Le Monde de Djayesse

Un peu de tout : du cinéma (beaucoup), de l'actu (un peu) et toute cette sorte de choses [A bit of everythying: cinema (a lot), news (a little) and all this kind of things]

Publié le par Djayesse
Publié dans : #Cinéma, #Drame, #Thriller, #Alfred Hitchcock
Psychose (Psycho - Alfred Hitchcock, 1960)

Unique.

Hitchcock au sommet de son art.

Dans son film précédent – North by Northwest (1959) – il était déjà arrivé à un très haut niveau, mais avec ce « petit film » (1), il arrive au sommet (2), réalisant l’un des plus grands films du cinéma mondial, merveille de direction et de cadrages, autour d’une intrigue proprement diabolique (3), servi par des interprètes à la hauteur de l’événement, Anthony Perkins en tête.

 

« A boy’s best friend is his mother. (4) » (Norman Bates)

Cette réplique pourrait presque résumer le film à elle toute seule tant la relation entre Norman (Anthony Perkins) et sa mère est fusionnelle, jusqu’à l’impensable. Mais ce n’est- pas Norman que nous suivons au début du film, c’est Marion Crane (Janet Leigh), secrétaire d’un agent immobilier qui vient de conclure une transaction de 40.000 dollars (une somme en 1960 !). La tentation est trop forte : Marion, au lieu d’aller déposer l’argent à la banque s’enfuit rejoindre son amant Sam Loomis (John Gavin). En chemin, exténuée, elle s’arrête dans un motel à l’écart de la grand route ; le motel Bates, tenu par Norman (Anthony Perkins) qui y vit avec sa mère.

 

Je le répète : ce film est extraordinaire. Pas un seul élément à enlever. Tout est pensé, planifié et exécuté avec une incroyable précision, maintenant un suspense des plus impressionnants, mettant les nerfs des spectateurs à rude épreuve, dans une période où le cinéma d’horreur et d’épouvante avait encore du chemin à faire avant d’arriver à une telle tension.

Comme toujours chez Hitchcock, c’est une accumulation de détails qui vont accompagner une intrigue parfaite, le réalisateur se concentrant sur chacun d’entre eux pour lui donner l’importance nécessaire pour l’insérer à son scénario, comme un immense puzzle qu’il va ensuite assembler sous nos yeux et qui sera ensuite corroboré par la séquence d’explication finale un tantinet agathachristien (5).

 

Un journal de Los Angeles, une page de carnet, des oiseaux empaillés : tels sont les accessoires indispensables de cette intrigue que le réalisateur met à notre disposition pour résoudre ce mystère. Ajoutez à cela un sens du cadrage fantastique, alternant travellings et plongées et vous aurez tous les éléments nécessaires pour comprendre ce qu’il se passe au motel Bates. Parce que tout est là : Hitchcock ne cache rien au spectateur. Ou plutôt si : la poitrine de Janet Leigh. En effet, la seule fausse note de ce film, et Hitchcock est longuement revenu dessus, c’est la présence de ce soutien-gorge dans la séquence d’ouverture. Certes, le Code Hays est encore en vigueur et surtout, mademoiselle Leigh n’a pas l’intention de dévoiler ses charmes au monde entier !

 

Et au-delà de ce détail pittoresque, il faut aussi voir dans cet interdit qu’Hitchcock va enfreindre onze ans  plus tard (pas avant !). La séquence incontournable de la douche est marquée par cette volonté de l’actrice de ne rien révéler : chaque plan est conçu pour ne rien montrer et quand cela aurait pu être possible, une main ou/et un bras se place devant la partie interdite. Bref, Hitchcock nous montre tout sans jamais rien dévoiler : du grand art !

Quant à la performance d’Anthony Perkins, elle tout bonnement admirable : il possède l’allure du jeune homme comme on peut en croiser à cette époque, au contact facile et au sourire charmant, mais dès qu’on commence à gratter la surface, il se met à perdre ses moyens. On découvre alors un autre personnage, inquiétant et lié maladivement à une mère impotente mais tyrannique.

On sent des pulsions chez ce jeune homme qui arrive presque à la cacher, amenant seulement une méfiance chez ses interlocuteurs mais pas beaucoup plus : vivre seul, à l’écart, dans une grande maison avec une mère invalide n’engendre pas la joie de vivre. Bien sûr, on retrouve des pulsions sexuelles – chez Hitchcock, le sexe est très présent – mais si Norman a tout du voyeur, il n’ira pas au-delà de ce qu’il aura pu apercevoir dans le trou qu’il a percé entre son bureau et la chambre de Marion. Est-ce de l’impuissance ?

Quoi qu’il en soit, Perkins joue avec beaucoup de brio sur son visage, servi par un éclairage parfait, mis en valeur par le noir et blanc du film (6).

Parce que le format noir et blanc amène beaucoup au film, créant une atmosphère inquiétante comme le souhaitaient les studios Universal dans les années 1930.

Mais la terreur qui se dégage de ce film est sans comparaison avec ces films d’avant : non seulement Hitchcock mène la tension à son paroxysme, mais il réussit à surprendre – et effrayer – les spectateurs de manière plus efficace que les réalisateurs de Universal.

 

On a, depuis, fait d’autres films d’horreur, avec un suspense haletant, mais jamais dans de telles proportions. Et surtout, ceux qui vont venir après vont se souvenir de ce que fit Hitchcock. A nouveau on sursautera, mais la force du maître, c’est d’avoir été le premier et surtout, d’avoir créé un suspense époustouflant sans jamais tomber dans le grandiloquent, ni utiliser une forme d’humour pas toujours bienvenu comme on peut le voir chez certains spécialiste de l’horreur. Oui, cette histoire est horrible et la violence est forte, Hitchcock n’épargnant pas le spectateur en lui proposant des images choc. Mais il le fait à bon escient, gardant toujours la bonne distance, étant spectaculaire sans devenir outrancier, et en restant sérieux sans toutefois se prendre lui-même au sérieux.

La classe, quoi.        

 

  1. Seulement 806.947 dollars.
  2. Même son film suivant, Les Oiseaux, n’atteindra pas cette perfection : quand on arrive au sommet, il ne reste plus qu’une chose à faire, descendre.
  3. « La meilleure amie d’un garçon, c’est sa mère. ».
  4. A l’instar du film du même nom de Clouzot, il est demandé aux spectateurs de ne pas raconter la fin après la projection. On comprend pourquoi.
  5. Je sais, je néologise : que voulez-vous, on ne se refait pas…
  6. Pour deux raisons : le sang est moins choquant et surtout, ça coûte moins cher !
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