Dernier volet sur la cavalerie et les guerres indiennes, Rio Grande, de par son titre, traite d’un lieu des plus stratégiques : le fleuve éponyme qui constitue une frontière naturelle entre les Etats-Unis et le Mexique (1).
Ce fleuve est régulièrement traversé par les Indiens – ici les Apaches – afin de se protéger des « Tuniques Bleues » après un méfait. Mais du fait que le fleuve est une frontière, les soldats ne peuvent le franchir sans provoquer un incident diplomatique avec tout ce que cela concerne.
Les soldats, ici, sont en garnison à Fort Starke, qui est le dernier fort avant la frontière et commandé par le général Sheridan (J. Carrol Naish), aidé du colonel Kirby York (John Wayne).
Parmi les nouvelles recrues, on trouve un trio de jeunes cavaliers courageux et téméraires : Tyree (Ben Johnson), Boone (Harry Carey Jr.) et York (Claude Jarman Jr.) qui n’est autre que le fils du colonel, renvoyé de West Point et qui s’est engagé pour laver son honneur, d’une certaine façon.
Le même jour arrive Kathleen York (Maureen O'Hara), bien décidée à récupérer son fils des griffes de l’armée.
Pour terminer sa trilogie, Ford reprend quelques-uns des interprètes (John Wayne, Victor McLaglen…) et conclut sur un coup d’éclat des soldats, secourant les enfants du fort des Apaches qui les ont enlevés.
Non seulement les acteurs « rempilent », mais certains possèdent le même nom que lors d’un des deux films précédents : John Wayne/York ; Ben Johnson/Tyree ; McLaglen/Quincannon…
Et tout comme le premier opus, le film est en noir et blanc (2), renforçant le côté noir de l’intrigue.
Mais surtout, l’aspect privilégié dans le film est la famille. Outre que certains enfants qui apparaissent sont ceux des acteurs (etc.), le film s’ouvre et se ferme sur les femmes qui attendent inquiètes le retour des soldats après une mission : leurs hommes seront-ils parmi les blessés, ou pire les morts ?
De plus, l’intrigue faisant se côtoyer le père et le fils sous les mêmes couleurs amènent certaines difficultés dont joueront Morris et Goscinny dans Le XXème de Cavalerie (1965), avec en prime le jeune McStraggle qui ressemble fort à Claude Jarman Jr.
Si l’intrigue est plus noire que les autres, elle n’empêche pas de nous proposer une belle bagarre qui oppose le fils du colonel, cible privilégiée entre les hommes du régiment, et Heinze (Fred Kennedy) qui se gaussait de la parenté du jeune homme. Cette bagarre fait partie des éléments incontournables des westerns de Ford, tout comme l’ivrognerie de Quincannon/McLaglen.
On retrouve un autre élément qui sera repris par Morris et Goscinny : les chœurs de soldats chantant des ballades irlandaises, émouvant les auditeurs.
Bref, avec Rio Grande, Ford tourne – encore – une page de l’Ouest américain, en donnant cette fois le beau rôle à ces cavaliers. Il tournera une nouvelle fois une histoire avec ces cavaliers neuf ans plus tard, mais cette fois le contexte sera la guerre de Sécession, donc un autre pan de l’histoire de ce pays.
Et bien sûr, on retrouve le microcosme habituel, dont Kathleen York est la femme forte qui sait mener son monde : têtue et opiniâtre comme son mari, elle ne se laisse pas faire quand il tente un rapprochement, surtout du fait de la destruction de sa demeure familiale pendant la guerre civile.
Elle prendra d’une certaine façon sa revanche de l’armée quand la fanfare jouera Dixie pendant la mise à l’honneur de son fils et ses camarades.
Avec ce film, Ford en termine avec les guerres indiennes du point de vue des Blancs. Vont suivre dorénavant des westerns aux intrigues où la place des Amérindiens sera plus grande et surtout plus juste (3) : je rappelle que les vrais Américains ne sont pas ceux qui ont colonisé le pays pendant les différentes vagues d’immigration qu’ont connues les Etats-Unis, mais bel et bien ceux qui étaient là bien avant eux.
PS : Jack Pennick est encore et toujours là. Le trouverez-vous ?
- Pas de mur possible à cet endroit, semble-t-il…
- La Charge héroïque est en couleur du fait du ruban jaune dont fait mention le titre original (She wore a yellow Ribbon).
- The Searchers, Cheyenne Autumn, Two rode together.