Tout part d’un pari. Deux policiers se lancent un défi : la jeune recrue ira en voiture là où le vieux briscard se déplacera à cheval, et en plus, il arrivera avant lui. S’ensuit une course à travers champs et autres obstacles naturels. Le tout sous l’œil attentif et curieux d’une romancière en quête d’inspiration (Nell Shipman).
Mais cette course ne nous intéresse pas. Nous allons suivre de notre côté les péripéties que va vivre une jeune femme (Nell Shipman) prisonnière d’une bande de ruffians menés par l’infâme Agrilla Gorgez (Merrill McCormick), réfugiés dans la Cuisine de l’Enfer (Hell’s Kitchen).
Mais Bill Baxter (Bert van Tuyle) veille et à l’aide de sa voiture, va retrouver la jeune femme et échapper aux bandits.
Vous l’avez bien deviné (enfin j’espère), c’est la romancière du début qui imagine cette course poursuite folle : à travers un paysage franchement inamical, la voiture va poursuivre les bandits et être ensuite poursuivie par ces mêmes bandits dans un décor accidenté qu’elle va réussir à franchir et sauver ses deux occupants. Bref, une magnifique publicité pour cette voiture qui en voit de toutes les couleurs (même si le film est en noir et blanc !).
Il s’agit ici du premier film de Nell Shipman en tant que réalisatrice, associée avec Bert van Tuyle qui était alors son compagnon et avec qui elle va traverser la première moitié des années 1920s. Non seulement ils ont codirigé le film, mais ils en ont écrit l’histoire et la belle Nell a en plus assuré la production.
Résultat : un western moderne, pour 1920 comme cent ans après. En effet, l’utilisation de la voiture comme tout terrain ancre définitivement l’intrigue dans le vingtième siècle, et le rôle interprété par Nell Shipman va à contre courant de ce qui était alors proposé aux jeunes femmes dans les westerns de cette époque : malgré ses allures de frêle jeune fille, elle a une grande force de caractère et sait faire beaucoup de choses qu’on n’attendait pas alors : elle conduit une voiture- tout-terrain avec autant de brio que son partenaire et surtout elle sait tirer au revolver – et au pistolet (1) – avec justesse, descendant un méchant qui est à leurs trousses.
Mais cette histoire de poursuite en voiture (de chaque côté : poursuivante et poursuivie) a ses limites et surtout une de taille : on se lasse. Une fois la voiture arrivée à Hell’s Kitchen, on se prépare à une résolution classique avec échanges de coups de feu et méchant tué mais non : la poursuite recommence avec les bandits – à cheval – qui courent après la voiture conduite alternativement par les deux héros. Et même quand on arrive à un cul-de-sac, une autre issue est révélée par le soleil naissant, relançant cette inlassable (sauf pour nous) poursuite jusqu’à sa résolution attendue mais tout de même plutôt violente : la dernière image que nous avons de Gorgez n’est pas des plus subtiles.
Au final, si la poursuite s’éternise un peu trop, on aura tout de même beaucoup de plaisir à retrouver Nell Shipman, une des rares femmes réalisatrices de Hollywood, dans un rôle qui ne se cantonne pas à de la figuration mais bel et bien une place au même niveau que son partenaire voire un peu plus : blessé, il s’en remet à elle qui va à la fin les sortir définitivement de cette situation on ne peut plus dangereuse.
- Si vous ne connaissez pas la différence entre les deux, je vous encourage à vous renseigner au plus vite.