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Le Monde de Djayesse

Le Monde de Djayesse

Un peu de tout : du cinéma (beaucoup), de l'actu (un peu) et toute cette sorte de choses [A bit of everythying: cinema (a lot), news (a little) and all this kind of things]

Publié le par Djayesse
Publié dans : #Cinéma, #Muet, #King Vidor, #Drame
La Foule (The Crowd - King Vidor, 1928)

John (James Murray) et Mary (Eleanor Boardman) sont deux anonymes dans la foule. Ils se rencontrent, ils se marient. Ils ont des enfants.

Une histoire banale. Mais au cinéma, rien n'est banal, sinon on n'en ferait pas un film.

 

Ici, nous suivons surtout John. C'est un petit garçon plein de promesses : d'ailleurs, son père fait tout pour qu'il soit un jour quelqu'un. Mais à 12 ans, Sim senior meurt, laissant John orphelin.

On échange les chiffres, et on retrouve John - 21 ans - prend New York d'assaut : il sera quelqu'un.

En attendant, il travaille comme comptable dans une grosse compagnie d'assurances. Mais il travaille le soir, pour gagner son paradis financier !

U n soir, d'ailleurs, Bert (Bert Roach) l'invite à l'accompagner à Coney Island s'amuser avec lui et deux jeunes femmes. John, réticent, accepte. Il fait la connaissance de Mary. Dans le Tunnel de l'Amour, ils s'embrassent : ils vont se marier.

Malgré le pessimisme de l'impayable Bert, leur union tient, et ils ont deux enfants.

Et quand une idée publicitaire est payée à John 500 dollars, c'est l'explosion de joie. Alors on appelle les enfants qui jouent dehors, afin qu'ils profitent de la fête. Mais c'est le moment que le destin attendait : leur petite fille se fait écraser.

Les malheurs vont s'enchaîner et John va se retrouver contre la foule des autres, ceux qui sont rentrés dans le rang.

 

Rien de bien joyeux dans ce film de King Vidor. Et c'est aussi pour ça qu'il se distingue des autres productions de la MGM. Il n'était pas de bon ton de montrer des situations ordinaires avec une fin triste. Mais Vidor s'est accroché. Et si nous voyons cette fin, c'est parce qu'elle fut l'une des neuf proposées. C'est sans doute la moins triste (la moins pire ?). Peut-être, parce que finalement, John n'atteint pas son but : il ne sera pas quelqu'un. Juste un clampin dans la foule, parmi tant d'autres.

Car c'est là que réside tout l'intérêt de ce film. On assiste à la naissance d'une romance rapide. Rapide, parce que la société l'exige : tout va vite : les voitures, les trains, les gens qui vont travailler. Alors on n'a que peu de temps pour soi, pour fonder quelque chose. On est sans cesse happé par cette marée humaine. Il faut voir la débauche pour s'en rendre compte : les gens qui sortent pile à l'heure : pas une seconde de rab. Et ça s'engouffre dans les ascenseurs, et ça s'en va bras dessus, bras dessous, vers son quotidien.

Pourtant, John n'a toujours eu qu'une envie : sortir du lot. Il se sent supérieur. Il se croit investi d'une mission, d'un but formidable. Il en devient même pénible pour son entourage. Il se croit supérieur et se moque du pauvre type obligé de jongler, habillé en clowns alors qu'il fait l'homme sandwich pour un resto-grill. Alors qu'il sera bientôt heureux de pouvoir prendre sa place pour subsister !

Dès que nous entrons dans New York, les choses sérieuses commencent. Vidor choisit un building, nous fait monter le long de la façade vers une fenêtre. Nous entrons : des bureaux à perte de vue. Alors il s'approche (magnifique travelling avant) vers un homme : John Sim, 137. Et cet individu, un nombre parmi tant d'autres, il va le sortir, le mettre en lumière. Il va lui faire vivre toutes ces péripéties, raconter son quotidien : sa rencontre, son mariage, son voyage de noces, sa vie quotidienne, sa belle famille (pas si belle que ça), ses enfants, ses malheurs. [A ce propos, il y a une émotion lors de la mort de la petite fille qu'on retrouvera dans Hallelujah, lors de la mort d'un autre enfant]

Mais si un enfant amène le malheur et la désolation, un autre ramène l'espoir. C'est complètement désespéré, proche du suicide que la révélation se fait : son fils l'aime ! Son fils voudrait être comme lui. C'était tout ce dont il avait besoin. Il va remonter la pente.

Mais pour cela, il devra tout de même rentrer dans le rang. Il devra retrouver sa place dans cette foule qui régit la vie de la société.

Alors il l'accepte. L'histoire est terminée. Et Vidor finit comme il a commencé. La caméra, dans un travelling arrière progressif, s'éloigne de ce couple à l'amour retrouvé, révélant la foule immense autour, jusqu'à le perdre complètement, happé - encore une fois - par la foule.

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