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Le Monde de Djayesse

Le Monde de Djayesse

Un peu de tout : du cinéma (beaucoup), de l'actu (un peu) et toute cette sorte de choses [A bit of everythying: cinema (a lot), news (a little) and all this kind of things]

Publié le par Djayesse
Publié dans : #Cinéma, #Tate Taylor, #Drame
La Couleur des sentiments (The Help - Tate Taylor, 2011)

Jackson, Mississipi, 196…

Eugenia « Skeeter » Phelan (Emma Stone) revient de l’université et découvre que sa nourrice, la vieille Constantine (Cicely Tyson) est partie vivre chez sa fille, à Chicago.

Rapidement, elle est embauchée par le journal local, alors qu’elle vise – bien entendu – un poste dans un grand quotidien national.

Coincé dans la rubrique d’aide à la ménagère, elle entreprend d’écrire un livre sur le sort des bonnes noires, dans un état on ne peut plus ségrégationniste voire carrément meurtrier envers les Noirs.

Mais ces femmes n’ont pas l’habitude de parler, et encore moins à une femme blanche.

 

Il est clair que l’enjeu est la couleur de la peau. Et Tate Taylor – ami d’enfance de Kathryn Stockett qui a écrit le livre dont est tiré le film – met en avant deux femmes emblématiques parmi tant d’autres. D’un côté on trouve Aibileen (Viola Davis), qui a passé sa vie à élever des enfants qui n’étaient pas à elle – pendant que son propre fils mourait des traitements inhumains réservés aux gens de couleurs – et Minny Jackson (Octavia Spencer), cuisinière hors pair et femme vindicative s’il en est, malheureusement mariée à un homme qui boit et la frappe.

 

En face, on trouve une communauté blanche des plus traditionnelles, sinon traditionnalistes, pour qui les gens de couleur ne sont bons qu’à les servir, tout en les payant (mal) puisque l’esclavage a été aboli.

Cette communauté ordinairement (1) raciste est illustrée par une brochette de jeunes femmes au foyer, riches et on ne peut plus pétries de préjugés raciaux. Leur dirigeante étant l’infâme Hilly Holbrook (Bryce Dallas Howard).

 

Et au milieu, Skeeter, rejetant les préjugés de celles qui furent ses amies, prise entre deux feux dans une société on ne peut plus sclérosée.

Si le film traite d’une émancipation, c’est avant tout celle de Skeeter qui s’affranchit de ses racines sudistes et racistes (2), pour épouser une cause qu’elle considère on ne peut plus juste, sachant qu’elle fut elle-même élevée par une de ces bonnes noires.

Les femmes dont elle raconte l’histoire dans son livre n’acquièrent alors aucune émancipation (le dernier indice temporel du film concerne les obsèques de JFK) : elle viendra plus tard, grâce aux combats incessants menés par les Noirs d’Amérique à la même période.

Je trouve alors un tantinet déplacé le procès d’intention qui fut fait à la sortie du film à ce propos.

 

Il s’agit avant tout d’une chronique qui se base sur des éléments authentiques et qui permet surtout de réaliser à quel point ces femmes furent maltraitées par une gentry on ne peut plus méprisante et surtout fort ingrate. Le rapport entre Aibileen et la jeune Mae Mobley (Eleanor & Emma Henry) résumant magnifiquement cette relation pleine d’affection et de paradoxe entre une femme noire et une future femme blanche qui aura certainement intégré les préjugés raciaux de sa famille en grandissant, ce que n’a pas fait pas Skeeter.

On retrouve alors des situations on ne peut plus connues de brimades et d’injustice, le spectateur s’indignant régulièrement devant l’attitude de ces mégères racistes : la séparation jusque dans les toilettes qu’on construit à l’écart – c'est-à-dire dehors – ou encore l’accusation de vol qui a toujours été bien pratique pour se débarrasser d’une personne indésirable.

C’est d’ailleurs à la suite de l’arrestation de l’une d’entre elles – Yule Mae Davis (Aunjanue Ellis) – qu’a lieu le tournant du film : accusée par la toujours haïssable Hilly, elle est arrêtée sans ménagement aucun par une police gagnée à la cause ségrégationniste, est-il besoin de le rappeler (3).

Cela nous amène donc à parler de la distribution. Bien sûr, Viola Davis est magnifique, tout comme l’irrésistible Octavia Spencer, qu’on retrouvera dans un film un peu similaire cinq ans plus tard (Dark Figures).
En face d’elles, Bryce Dallas Howard joue elle aussi avec beaucoup de justesse cette femme désagréable, et si Emma Stone campe une Skeeter qu’on a envie de suivre, on ne peut pas ignorer la performance de Jessica Chastain (Celia Foote) dans un rôle de belle idiote, absolument en décalage avec son époque et bien sûr celles qui furent (peut-être un jour) ses amies.

 

Oui, l’émotion est là. Mais et alors ? On a le droit d’avoir un film avec de beaux sentiments (en couleur, bien sûr) où le ton et le jeu des actrices sont à la hauteur de l’enjeu.

Alors prenez le temps d’aller voir une belle histoire, où  les méchants sont tout de même (un peu) châtiés à la fin. C’est manichéen (4) certes, mais qu’importe.

C’est beau.

 

  1. Il est parfois difficile pour une grande frange de la population actuelle que le racisme fut longtemps considéré comme normal, que ce soit aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, en France ou ailleurs. Malheureusement, beaucoup n’ont toujours pas évolué et continuent de trouver cela tout à fait normal.
  2. C’était alors une forme de pléonasme.
  3. Oui. Ne jamais l’oublier.
  4. On peut difficilement faire plus…
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