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Le Monde de Djayesse

Le Monde de Djayesse

Un peu de tout : du cinéma (beaucoup), de l'actu (un peu) et toute cette sorte de choses [A bit of everythying: cinema (a lot), news (a little) and all this kind of things]

Publié le par Djayesse
Publié dans : #Cinéma, #Drame, #William Dieterle, #Charles Laughton
Quasimodo (The Hunchback of Notre-Dame - William Dieterle, 1939)

Encore un effort, on y est presque !

Après l’adaptation mémorable de Wallace Worsley en 1923, mémorable surtout pour la performance phénoménale de Lon Chaney, Hollywood nous propose une nouvelle mouture, tournée par un Allemand, le non moins talentueux William Dieterle, qui nous rappelle ici qu’il vient du pays où l’éclairage cinématographique doit ses lettres de noblesses.

Mais malgré tout cela, nous sommes encore bien loin de l’intrigue hugolienne qui reste plus que jamais (en 1939) taboue et surtout qui ne peut être proposée telle que l’avait voulu l’immense auteur, le Code Hays réprouvant certains éléments allant à l’encontre des bonnes mœurs. Enfin surtout de celles que le Code juge « bonnes ».

 

Nous retrouvons donc le sonneur de cloche, toujours aussi bossu, sous les traits – déformés – de Charles Laughton qui, reconnaissons-le, interprète un sonneur tout à fait acceptable, si ce n’était son élocution un tantinet trop fluide pour un tel personnage : comment Quasimodo peut-il s’exprimer avec une telle fluidité, n’ayant jamais eu les stimuli intellectuels nécessaires ? Passons.

Côté Esmeralda, c’est la superbe Maureen O’Hara qui prête ses traits à la Bohémienne, toujours aussi dansante mais un peu moins accompagnée de sa chèvre (1). Quoi qu’il en soit, elle a beaucoup plus de corps que Patsy Ruth Miller chez Worsley (2), mais demeure encore loin de l’archétype du personnage comme nous le montrera Jean Delannoy 17 ans plus tard avec la sublime Gina Lollobrigida.

 

Puis vient Frollo. Et c’est là que les choses se gâtent. Certes, comme le dit mon ami le professeur Allen John, nous sommes au cinéma, et il faut prendre le film pour ce qu’il est : une vision d’après un scénario. Mais on ne peut adapter impunément un tel classique de la littérature mondiale : le Frollo, personnage maléfique de l’histoire est ici Jehan (Cedric Hardwicke), frère de Claude (Walter Hampden) qui est pour sa part l’archevêque de Paris et donc le « patron » de et dans la cathédrale. Que Jehan soit le méchant de la partie est plus commode pour contourner le code Hays (toujours lui) qui ne peut accepter qu’un homme de Dieu devienne un assassin. D’ailleurs, même Delannoy respectera cet état de fait puisque son Frollo (Alain Cuny) ne sera pas identifié comme prélat ou autre robin.

Mais cela n’empêchera pas ce même Frollo de subir le même destin : précipité dans le vide du haut de la cathédrale. Mais j’anticipe.

Autre personnage haut en couleur : Clopin Trouillefou (Thomas Mitchell), qui ne conserve que son surnom, mais campe un roi d’argot (ou des gueux) truculent à souhait, n’évitant pas, lui non plus, son destin funeste.

 

Mais derrière la caméra, nous trouvons un William Dieterle très inspiré, soutenu par le travail magnifique de Joseph H. August qui est tout sauf un débutant, aidé d’un éclairage très inspiré qui amène es cadrages splendides et un jeu d’ombre et de lumière du plus bel effet.

Mais voilà : on ne peut claironner qu’on adapte le chef-d’œuvre de Victor Hugo et effectuer de tels changements. Certes, c’est un film, mais il ne faut pas trop prendre les spectateurs pour des imbéciles. Les changements – mineurs, tout compte fait – sont une chose, dénaturer l’intrigue en est une autre. Dieterle, avec l’aide active de Sonya Levien, nous refait le même coup que Worsley seize ans plus tôt en sauvant Esmeralda pour une happy end, certes, mais totalement en contradiction avec l’intrigue originale.

 

Est-ce à cause de cette trahison (3) que le préposé à la traduction des titres (4) de films n’a pas voulu que le film s’intitule tout naturellement Notre-Dame de Paris ? En effet, le titre original est celui qui fut imposé à la traduction du roman d’Hugo. Et même en 1923, le film fut traduit ainsi.

Toujours est-il que malgré ces défauts, Quasimodo reste une adaptation brillante d’un réalisateur inspiré, servi par une distribution à la hauteur de l’événement, grâce aussi au travail de maquillage formidable de Perc Westmore qui n’est même pas crédité au générique.

 

Alors oubliez ce que je viens décrire, et précipitez-vous sur cette nouvelle adaptation du roman d’Hugo – la sixième si je ne m’abuse (comme dirait Fritz Lang) – rein que pour Charles Laughton. Et puis aussi Maureen O’Hara…

 

  1. Il semble que le nom de cette chèvre – Djali – n’ait pas conquis les grâces de Sonya Levien (qui signe le scénario) puisqu’elle se fait appeler ici Aristote (en VO : « Aristotle »).
  2. D’un autre côté, qui en aurait moins ?
  3. C’est peut-être un peu fort comme terme. Encore que…
  4. Il devait y en avoir un, c’est sûr.

 

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