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Le Monde de Djayesse

Le Monde de Djayesse

Un peu de tout : du cinéma (beaucoup), de l'actu (un peu) et toute cette sorte de choses [A bit of everythying: cinema (a lot), news (a little) and all this kind of things]

Publié le par Djayesse
Publié dans : #Cinéma, #Chevalerie, #Ridley Scott, #Ben Affleck
Le dernier Duel (The last Duel - Ridley Scott, 2021)

D’un côté le challenger : Jean de Carrouges (Matt Damon), chevaler du roi Charles VI (Alex Lawther), guerrier terrible et fruste, marié à la belle Marguerite (Jodie Comer). De l’autre, Jacques Le Gris (Adam Driver), écuyer aux manières sophistiquées (il sait lire !), et au charme sûr, au service du comte Pierre d’Alençon (Ben « Batman » Affleck). Tous deux s’affrontent dans l’immense lice de Paris. Nous sommes le 29 décembre 1386.

Pourquoi s’affrontent-ils ? Pour faire éclater la vérité : Marguerite accuse Le Gris de l’avoir violée. Et ce dernier nie en bloc, évidemment.

Et quand le premier assaut se produit, le film commence réellement : comment en est-on arrivé à cette ordalie (1) ?

 

Ridley Scott, après Kingdom of Heaven et Robin Hood, retourne au Moyen-âge, avec un film qui ne peut que résonner dans la tête de ses admirateurs : on se souvient que c’est avec The Duellists qu’il s’est fait connaître et apprécier, presque 45 ans plus tôt. Pour ce nouveau film, il retrouve son Martien, qui interprète ici un personnage fort éloigné de l’étonnant survivant de l’espace. Et surtout, Matt Damon n’est pas venu seul : il retrouve son vieux complice Ben Affleck avec qui il avait déjà co-écrit le scénario de Good Will Hunting, vingt-cinq ans plus tôt. Associés à Nicole Holofcener, ils signent donc un scénario intéressant et, malgré l’époque, d’actualité, propice à l’exposition du savoir-faire de Scott.

Et bien sûr, ça fonctionne !

 

Bien entendu, nous sommes au cinéma, alors la vérité historique n’est pas obligatoirement respectée (la construction de Notre-Dame, par exemple), mais il n’empêche que le film est remarquable de bout en bout, Scott resserrant son intrigue entre les trois personnages principaux : la femme et les deux hommes.

D’un côté, nous avons donc un chevalier un tantinet barbare (Carrouges), indiscipliné et sans descendance, qui accepte d’épouser la fille d’un ex-félon (Nathaniel Parker), et aussi pour renflouer son trésor. De l’autre on trouve donc un jeune écuyer valeureux (Le Gris) lui aussi mais beaucoup plus raffiné et surtout au charme qu’il considère lui-même irrésistible.

Entre les deux, Marguerite va être l’enjeu de ce duel à mort entre deux hommes qui auraient dû rester amis.

 

Et Scott va découper son film en quatre parties, s’attardant sur le ressenti de ses personnages, donnant à voir pour chacun sa vérité : on suivra tout d’abord celle de Carrouges puis celle de Le Gris pour finir sur celle de Marguerite, la plus complète des trois : normal, c’est elle la victime. Et bien sûr, tout ne va être qu’une question de point de vue, certaines séquences se répétant jusqu’à trois fois – la rencontre/présentation entre Marguerite et Le Gris qui est l’un des moments-clés du film, entraînant le reste – avec des changements de cadrage en fonction du point de vue exposé.

Et ces changements font tout le sel de la narration, amenant des parallèles entre les différentes versions ou les comportements : Le Gris tel qu’il se montre (2) n’est pas bien différent avec Marguerite d’avec les autres femmes qu’il courtise (et besogne après), et on peut se poser la question de sa sincérité, même si la réponse est évidente dans la partie de Marguerite.

 

Et c’est dans le rapport entre Le Gris et Marguerite que le film prend toute son actualité : Marguerite a décidé de parler, de ne pas garder son viol pour elle, malgré les conséquences (dont certaines qu’elle découvrira une fois qu’il sera trop tard) que cela va déclencher. Et on retrouve dans son entourage les mêmes positions que de nos jours et son entrevue avec sa belle-mère (Harriet Walter) est très significative. Cette dernière a elle-même été violée mais n’en a pas fait tout un cas, ce qu’elle reproche  sa belle-fille qui met en danger la vie de son fils (Jean). Le procès qui s’ensuit, présidé par le Roi lui-même, est à nouveau un écho de ce que peuvent vivre les femmes violées aujourd’hui, les (autres) juges essayant de minimiser le geste de Le Gris en essayant de découvrir une faille dans le témoignage de Marguerite : y a-t-elle pris du plaisir ?

 

Et puis il y a le dernier duel, celui qui va décider du sort des Carrouges et de Le Gris. C’est un moment crucial du film mais aussi très spectaculaire : les assauts à la lance puis le combat à pieds entre les deux protagonistes sont magnifiques. Et si on y retrouve le même engagement que dans celui de Maximus contre Commode (Gladiator), on pense aussi (et comment !) à une autre ordalie cinématographique célèbre : Ivanhoe. Surtout que comme chez Richard Thorpe, Carrouges porte une hache de combat. Est-ce un signe de victoire ?

Rendez-vous dans le film pour le savoir…

 

  1. On appelle ça aussi le « Jugement de Dieu ».
  2. Ce n’est pas lui qui raconte, je sais, mais c’est sa vérité.
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