Après avoir vu les trois grands Dr Jekyll & Mr Hyde (Robertson, Mamoulian et Fleming), j'ai voulu finir sur une note plus légère avec cette réalisation de Jerry Lewis soi-même.
Et quelle réussite !
Voilà plus de cinquante ans qu'il est sorti, mais il marche toujours. Même après plusieurs visionnages. Je ne m'en lasse pas.
Jerry Lewis est un comique complet qui, s'il n'a pas toujours tourné dans des chefs-d'œuvres inoubliables, a toujours su faire rire. Et là, tout est bon : le mime, les mimiques, les expériences scientifiques qui tournent mal, la voix, et LA MONTRE ! Rien que la montre vaut le déplacement.
Mais revenons à la base : ici, le professeur ne s'appelle pas Jekyll, il n'a pas de théorie philosophique pour étayer sa recherche, il ne tue personne. Par contre, il chante magnifiquement, il est fort comme un turc, il a une assurance infinie : il ne séduit pas, il envoute !
Autrement, le propos du film est le même : la dualité de la personne.
Et l'envoutée, c'est la belle Stella, une jolie jeune fille blonde qui n'a d'yeux que pour lui... Quand il est normal !
Mais Kelp - le petit professeur - crée le personnage de Buddy Love pour s'imposer. Malheureusement pour lui - pas pour nous ! - c'est Buddy qui va s'imposer à lui.
Kelp, c'est le Jerry Lewis que nous connaissons : il est maladroit, myope comme une taupe, a des dents proéminentes et une voix de crécelle. Il a aussi une façon bien à lui d'apprécier la musique...
Buddy Love, c'est tout ce que n'est pas Kelp : il a l'assurance, il a une coupe à la mode, il est habillé dernier cri, et une voix de velours dont les filles se pâment. Tout pour plaire... Oui, mais un poeu plus aussi : il est d'un égocentrisme forcené. Le véritable contraire de Kelp. Plutôt Dean Martin que Jerry Lewis.
Mais nous sommes tout de même attirés par ce petit professeur qui a du mal. Et comme nous savons que tout se finira bien pour lui, alors nous savourons pleinement les situations dans lesquelles il se fourre. Et on en a pour son argent : la transformation est grandiose et nous rappelle Mamoulian ou Fleming, avec juste ce qu'il faut de dramatique pour avoir peur du résultat. Par contre, le processus inverse, avec le changement de voix de Jerry Lewis est irrésistible. Un grand moment.
Bref, un grand film comique, avec un acteur qui, quand il était bien employé*, pouvait toucher au sublime.
*Comme il réalise le film, il ne peut que bien s'employer !