Il y a aux Etats-Unis un thème Qui revient très souvent dans le cinéma : la presse. On retrouve ce sujet dans de nombreux films, que ce soit au temps du muet comme ce film, ou beaucoup plus récemment avec le magnifique Pentagon Papers.
Capra, qui signe ici un de ses derniers films muets a plus d’une fois décrit ce medium, racontant de nombreuses histoires ayant pour personnages des journalistes.
S’agit-il ici du premier film de ce genre ? Peu importe. Il se trouve que Capra réussit un beau film, illustrant magnifiquement ce pouvoir de la presse (1) : que ce soit pour informer et mettre au jour des affaires importantes, mais aussi pour dénigrer certaines personnes sous prétexte que « l’information doit paraître ! »
Nous sommes à New York, au Times, et Clem Rogers (Douglas Fairbanks Jr., le fils de) végète entre les bulletins météo et les enterrements. Alors quand le rédac’ chef (Robert Edeson) l’envoie – faute de pointure à disposition – enquêter sur le meurtre du District Attorney Nye (Charles Clary), non seulement il dégotte un scoop, mais en plus il fait la une du nouveau journal.
Sauf que la jeune femme qui est mise en cause est la fille d’un candidat à la mairie et que cette jeune femme – Jane Atwill (Jobyna Ralston – était juste au mauvais endroit et au mauvais moment. Encore que…
Avec ce film, Capra prend un peu de distance avec la comédie slapstick qu’il a pu développer avec Harry Langdon et évoque ici un sujet tout à fait sérieux. On a d’ailleurs droit à la chaîne des différentes étapes de parution d’un quotidien, de la machine à écrire du journaliste jusqu’à la parution en kiosque (2). On retrouve alors ce qui fascine toujours les yeux des profanes : comment les pages sont imprimées et tout ce qui suit.
Mais nous sommes au cinéma et rapidement l’intrigue reprend le dessus sur le documentaire et on assiste alors à une quête de la vérité, la base du travail d’un journaliste.
A cela s’ajoute une belle bande de scélérats menés par l’autre candidat à la mairie – l’infâme Robert Blake (Philo McCullough) – et secondé par son homme de main Van (Wheeler Oakman) qui n’hésite pas à tuer quand cela est nécessaire.
La fin est donc une séquence au suspense haletant : entre Van qui veut tuer Clem et Marie (Mildred Harris) qui va tout balancer sur son patron et lui-même, et la poursuite en voiture, c’est un final magnifique, bien qu’on ait perdu un petit bout de pellicule (3).
En effet, la poursuite est menée tambour battant avec des plans audacieux qui montrent le point de vue des différents protagonistes – celui de Marie alors qu’elle tente tant bien que mal de rester sur la route, longeant des précipices est impressionnant – sans oublier les caméras qui furent embarquées sur les véhicules ce qui évite alors les raccords hasardeux de l’incrustation.
A un moment tout de même, on peut découvrir le pot-aux-roses. C’est bien Douglas Jr. qui conduit, mais sa vitesse est on ne peut plus raisonnable : le décor sur son côté gauche (le droit pour nous) ne défile pas à la même vitesse que quand on voit les véhicules se poursuivre.
Certes on a mieux fait depuis en poursuite réelle (Bullitt, The French Connection…), mais tout de même, Capra filme tout cela avec beaucoup de talent.
Mais puisque c’est Capra, on n’était obligé d’avoir quelques éléments comiques : la rivalité entre Clem et le reporter chevronné Bill Johnson (Dell Henderson) est une mine de gags visuels très drôles.
Au final, nous avons un film très intéressant, de par son témoignage historique sur le fonctionnement du Times en 1928, et une distribution pertinente avec toutefois une petite déception : Jobyna Ralston aurait très certainement pu être un peu plus mise en valeur (4).
Si Douglas Jr. ne saute ni ne bondit pas comme son père, il est tout de même capable d’emporter la sympathie des spectateurs, montrant qu’il n’est pas seulement le fils de son père.
Encore une pépite de la fin du muet et surtout d’un réalisateur qui va s’épanouir dans la décennie suivante, proposant des comédies qui portent la « Capra’s touch » qui nous fait sortir d’une projection avec le sourire…
PS : message personnel au professeur Allen John : est-ce Douglas Sr. qu’on peut apercevoir parmi les photos glanées par Nye ?
- La traduction du titre.
- On est aux Etats-Unis donc ce ne sont pas des « kiosques » comme à Paris mais plutôt des étalages.
- Ca arrive, des fois…
- J’avoue aussi que j’ai un faible pour cette actrice…