Sherlock Holmes (Robert Stephens).
L’un des personnages les plus adaptés au cinéma se retrouve confronté à un ennemi des plus redoutables qu’il ait jamais dû affronter : Gabrielle Valladon (Geneviève Page).
Non pas que cet(te) ennemi(e) soit des plus redoutable, mais parce qu’elle met en lumière le rapport de Holmes avec les femmes : un rapport des plus distinct voire lointain comme il tente de s’en expliquer avec son ami et complice de toujours : le docteur Watson (Colin Blakely).
On peut bien sûr voir un écho dans le rapport aux femmes de Holmes avec Joe/Josephine (Tony Curtis) et Jerry/Geraldine (Jack Lemmon, un habitué du maître) : Holmes va se faire passer pour homosexuel afin d’échapper à une femme vampire de la pire espèce (pour lui) : la Petrova (Tamara Toumanova) qui veut un enfant de lui (entre sa beauté et son intelligence…)
Mais cela ne dure pas et nous sommes rapidement envoyés sur une intrigue digne d’Arthur Conan-Doyle, même si elle fut élaborée par Wilder soi-même (n’oublions pas qu’il a commencé comme scénariste) et I.A.L. Diamond. Et de ce point de vue, l’auteur originel n’a pas été trahi : nous sommes dans une nouvelle énigme qui n’a rien à envier aux autres, extrapolant sur le rapport lointain que l’immense détective entretient aux femmes.
Certes, Gabrielle Valladon n’est pas Irene Adler, mais alors que Guy Ritchie extrapole lui aussi sur un personnage existant chez Conan-Doyle, Wilder crée cette Gabrielle de toute pièce, donnant une autre dimension à cette femme rescapée d’une noyade tamisienne.
A nouveau, on retrouve chez Holmes ce qui a fait son personnage dans les différentes adaptations cinématographiques, sans toutefois l’aspect misanthropique qui lui est propre dans les récits de Conan-Doyle (1).
Et bien qu’l, s’agisse d’une histoire absolument extérieure au personnage de papier que nous connaissons, il faut avouer que Wilder a réussi à créer pour nous une histoire dans la droite lignée de celle de son créateur originel, avec un Watson chroniqueur certes, mais avant tout humain : son attitude auprès des danseuses du ballet de la Petrova ne sera tempérée que par le tour de cochon que fera Holmes pour se dégager des griffes de cette dernière (voir ci-dessus).
Bref, un film où à nouveau l’ambiguïté est de mise, à travers le personnage principal qui est un misogyne assumé jusqu’au moment où Gabrielle entre dans sa vie. Mais cette intrusion pertinente s’explique essentiellement par le fait qu’elle se rue, nue, hors de sa chambre pour se lover entre les bras de son nouveau protecteur qu’elle prend pour son mari, Holmes.
Bien sûr, Wilder parsème son film d’éléments propices à nourrir l’intrigue policière (c’est une enquête, ne l’oublions pas, mais c’est peine perdue : nous n’avons d’yeux que pour cette idylle singulière entre deux personnages d’exception, sous les yeux d’un témoin partial – peut-être – mais avant tout digne de foi, comme semble le montrer le générique, relique du film initial qui devait être beaucoup plus long.
Et somme toute, Wilder réussit à capturer ce qui fait le sel des aventure du détective, nous proposant une aventure un tantinet décalée de ce que nous avons pu lire ou voir auparavant, mais sans sortir du cadre – éthique – élaboré par Sir Arthur.
Une réussite.
- On retrouve cette dimension dans la belle série Sherlock de 2010 (avec Benedict « Dr. Strange » Cumberbatch dans le rôle-titre)