Pour Max
C'est avec l'ouverture des Noces de Figaro (de Mozart, bien sûr) que tout commence.
D'un côté, le monde des riches : belle maison, serviteur, petit déjeuner au lit ; de l'autre misère, ou si ce n'est pas ça, ça y ressemble beaucoup.
Dans ce film, presque tout est à prendre sur un modèle double : d'un côté les riches et de l'autre les pauvres. Les bons et les méchants.
Sauf que les pauvres ne sont pas obligatoirement les bons, ni les riches les méchants. Enfin pas tous.
D'un côté, Louis Winthorpe III (Dan Aykroyd) : bonne famille, éducation irréprochable, Harvard, Yale (etc.). C'est un homme froid. Il aime une femme qui doit lui donner des héritiers. Ce n'est pas de l'amour, c'est du pragmatisme : sur son bureau, la même photo d'elle qu'à la maison. De l'autre Billy Ray Valentine (Eddie Murphy) : école de la rue, mendicité... Il est le négatif (moral ET physique) de Winthorpe. Tout comme son homologue, il est le jouet d'une situation qui lui échappe totalement. Mais si Winthorpe a beaucoup de mal (qui n'en aurait pas ?), il se moule parfaitement dans son nouveau rôle. Entre les deux : Mortimer et Randolph Duke (Don Ameche & Ralph Bellamy).
Parce que le problème, ce sont ces deux vieux schnoques. Ils sont (scandaleusement) riches, et comme tous les riches, immensément radins. Et s'ils ont le même objectif dans la vie (faire de l'argent), c'est du point de vue éthique qu'ils s'opposent.
Pour Mortimer, tout est inné : c'est dans les gênes que se trouve la valeur. On naît du bon côté et tout s'enchaîne..
Pour Randolph, par contre, c'est l'environnement qui crée les conditions de réussite (ou non).
C'est sur cette opposition qu'ils vont s'affronter. Pour les départager, deux cobayes : Valentine et Winthorpe. Tout ça parce qu'un jour, Winthorpe, porteur d'un attaché-case de valeur est rentré dans Valentine qui ne demandait rien. Et comme en plus, Valentine est noir...
Parce que la question noire est l'un des cœurs du problème : ces deux vieux tromblons sont racistes : même si Randolph semble nourri d'idées progressistes, il n'est pas mieux que son frère, un petit blanc raciste et mesquin.
Nous sommes en 1982 (pendant le tournage). Ce sont ce qu'on appellera les années Reagan : des années où l'argent est le maître, où tout est bon pour en faire. Et tant pis pour ceux qui n'y arrivent pas. Valentine fait partie de cette dernière catégorie, alors que Winthorpe est le fer de lance de cette politique.
Mais avec ce pari, les données changent et Winthorpe passe de l'autre côté : il ne veut plus cautionner le système des Duke. Sauf que...
Sauf que Valentine est lui aussi passé de l'autre côté. Et rapidement il a pris conscience de la valeur des choses. Il ne cautionne plus la conduite de ses « amis » qu'il a invités chez son nouveau chez lui (« fuck'em! dit-il à leur propos). Valentine n'est plus du côté des pauvres. Et le final ne contredit pas cela.
Avec tout cela, nous assistons à une belle comédie où l'argent est - sinon le fer de la guerre, du moins - le maître. Il n'y a pas de morale affichée : l'argent gagne. Et ceux qui avaient n'ont plus, et ceux qui avaient moins ont maintenant.
Il n'empêche que cette comédie bénéficie de deux atouts : Dan Aykroyd et Eddie Murphy. Dan Aykroyd, qui a longtemps amusé l'Amérique avec son complice John Belushi (malheureusement décédé d'une overdose) et Eddie Murphy, qui, en plus d'être noir [et qui fournit ainsi un critère d'embauche pour le film (ce fameux principe de tolérance cher aux Américains, mais qu'importe, Murphy est (presque toujours) irrésistible] est formidable dans le rôle de Valentine.
Ces deux stars sont en outre aidées de seconds rôles solides : Ophelia (Jamie Lee Curtis, qui n'a pas seulement une plastique) et Denholm Elliott, valet pas si dévoué que ça.
Et à la fin, qui a gagné ? Les hommes ou l'argent ?