Un pirate avec une natte et une verrue.
Un pirate aveugle.
Un pirate unijambiste.
Un trio improbable pour un trésor qui doit l'être tout autant. Quoi que...
Au milieu : Jim Hawkins (Jackie Cooper).
Depuis la mort de son père, le jeune Jim Hawkins dirige l'auberge de l'Amiral Benbow, avec sa mère et sa petite sœur.
Le jour de l'anniversaire de Mrs Hawkins débarque (c'est le cas de le dire) le capitaine Billy Bones (Lionel Barrymore), avec un immense coffre bien lourd, une natte relevée à l'arrière du crâne, et une immense verrue sur la joue gauche. Ce n'est pas le genre d'invité qu'on attendait. D'ailleurs, tous les autres s'en vont. Mais avec lui, en plus de son lourd bagage, Bones amène un secret : le trésor du capitaine Flint enterré sur une île de l'Atlantique. Il possède en la carte.
C'est d'ailleurs cette carte que Pew, le pirate aveugle, est venu récupérer.
C'est finalement Jim Hawkins qui va récupérer cette carte. Va commencer pour lui une aventure peu commune qui le mènera au milieu de l'Atlantique, à la recherche d'un trésor, et surtout accompagné d'un vieux forban à une seule jambe : Long John Silver (Wallace Beery).
Tout comme le livre, le film se déroule du point de vue de Jim. Jackie Cooper est d'ailleurs très convaincant en jeune aventurier un tantinet naïf - mais qui ne le serait pas avec un vieux loup de mer roublard comme Long John Silver ?
Parce que le personnage principal, même s'il n'est pas le héros, c'est bien Silver. Il est fourbe, menteur, meurtrier, voleur... Mais on ne peut pas s'empêcher de l'aimer. Il faut dire que Wallace Beery nous fait une magnifique prestation. Il est un Silver truculent, au-delà de sa nature criminelle. Pas étonnant que Jim se fasse avoir à chaque fois.
Parce que cette association entre le pirate et le jeune garçon est le sel du film. Trois ans après Le Champion (King Vidor, 1931), Beery et Cooper sont à nouveau réunis, pour notre plaisir. On sent une complicité entre ces deux personnages extrêmes. Ce sont les négatifs l'un de l'autre. Silver est un vieux briscard, Jim est un candide ; Jim est un garçon d'honneur, Silver ment comme un arracheur de dent ; Silver est un gros malhonnête, Jim très probe. Bref, Silver est corrompu jusqu'à l'os, quand Jim est un pur, un vrai.
Mais Silver, malgré ce que nous savons, n'en reste pas moins attaché à Jim. Il ira même jusqu'à le défendre contre ses amis pirates. Ce sauvetage est son passeport pour la rédemption. C'est cette bonne action qui lui vaudra d'être sauvé et non pendu à la grand-vergue comme il se devrait.
Parce que Silver est tout sauf un gentil, comme il aime à se qualifier quand Jim le rencontre. Pendant la traversée, les morts se multiplient, toutes plus violentes les unes que les autres. Et ce n'est pas tout. Une fois arrivé sur l'île, les morts violentes continuent, les pirates prenant d'assaut la place tenue par les comparses de Jim. Certes, il n'y a pas beaucoup de sang visible. Mais tout de même : comme dans le livre, on assiste à la mort d'un pirate tué d'un coup de mousquet par Jim. La mort est très présente dans ce film. Ca commence par celle de Billy Bones, terrassé par l'abus d'alcool, et ça continue avec Pew, qui est écrasé - sous nos yeux - par le carrosse du docteur Livesey (Otto Kruger). Par conséquent, le retour de l'île se fait avec un équipage minimal : les pirates qui n'ont pas été tués sont abandonnés sur l'île.
En conclusion : la MGM nous offre une production d'un incontournable de la littérature anglo-saxonne de très bonne facture. Fleming dirige - comme toujours - son équipe d'une main de maître et les acteurs choisis sont très pertinents. De Lionel Barrymore - inoubliable, même si le rôle est court - à Lewis Stone - toujours digne, droit, aristocratique, comme d'habitude - en passant par Otto Kruger et Nigel Bruce, sans oublier le duo Beery-Cooper, tous concourent à faire de ce film une très belle adaptation.