11 septembre 2001 : destruction des Tours jumelles.
2 mai 2011 : mort d’Oussama Ben Laden suite à la prise d’assaut de son repaire.
Entre ces deux dates, près de 10 années de traque menée par la CIA pour le mettre hors d’état de nuire.
C’est cette histoire que nous raconte ici Kathryn Bigelow, essentiellement du point de vue de Maya (Jessica Chastain), une jeune membre de l’Agence, entre Langley (Va) et Abbottabad (Pakistan), en passant par différents états du Proche Orient.
La séquence d’ouverture donne le ton : Dan (Jason Clark) procède à un interrogatoire « musclé » auprès d’Ammar al-Baluchi (Reda Kateb), sous les yeux de Maya dont la réaction n’est pas bien claire.
Bien sûr, il s’agit de torture, même si le mot n’est jamais prononcé. Et pas une seule fois cette pratique ne sera remise en cause tant que l’administration Bush Jr. restera aux commandes du pays.
Il y a toujours eu dans le cinéma américain une maturité que les Français ont du mal à acquérir : il n’a jamais fallu beaucoup de temps de silence avant d’évoquer un événement historique. Il suffit de se souvenir du traitement de la Guerre du Vietnam pour s’en convaincre. Ici aussi, la traque de Ben Laden (Ricky Sekhon) est encore fraîche dans les esprits quand le film sort, et on peut aussi y trouver une des raisons du succès du film.
L’autre raison – la plus vraisemblable – est que le travail effectué sur ce film est absolument gigantesque et d’une très grande rigueur.
On sent que le sujet est maîtrisé et aux où l’information est libérée (sinon totalement libre), les sources sont nombreuses et vérifiables, surtout dans ce domaine. Nous suivons alors les différentes phases de recherche de cet ennemi public n°1, les avancées tout comme les régressions : l’interdiction de l’usage de la torture étant considérée par ces gens-là comme une terrible régression.
Le jeu des différents acteurs et la présence de la caméra aux premières loges donne une dynamique authentique aux images, chaque différente étape faisant l’objet d’un chapitrage jusqu’à la dernière partie : les Canaris (1).
Le montage lui aussi est essentiel au déroulement du film, alternant les phases en fonction de l’intensité et du spectaculaire, et surtout les différents attentats qu’ils soient à Londres (7-7-2005) comme à Islamabad (20-9-2008).
D’une manière générale, on retrouve la rigueur du précédent film de Bigelow : Démineurs. Mais alors que ce film traitait du quotidien d’un soldat en particulier réalisant ce qu’on attendait de lui, il n’y avait pas l’aspect national voire international du propos de Zero.
Ici, la petite histoire rejoint la grande. Mais encore une fois à travers des yeux humains : les scènes de torture assumées (surtout avec Dan) ne nous sont pas épargnées, et alors qu’on pouvait attendre d’elle un regard de commisération – c’est une femme – on se rend compte que Maya est rompue à ce genre d’exercice et que pour elle comme pour Dan ou tous les autres qui ont pu pratiquer la torture sous divers régimes et latitudes, seul compte le résultat.
Si le film est bien documenté et nous retransmet les différentes phases d’une opération on ne peut plus importante, nous ne pouvons pas oublier qu’il s’agit avant tout d’une exécution légale : pas un instant il n’est question de traduire OSB devant quelque tribunal que ce soit. De plus, un rappel aurait été judicieux à la fin du film : plusieurs des protagonistes d’Al-Qaïda sont toujours retenus prisonniers dans la base de Guantanamo (2).
- Nom donné aux soldats d’intervention qui ont délogé et tué OBL.
- Ils sont actuellement 40.