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Le Monde de Djayesse

Le Monde de Djayesse

Un peu de tout : du cinéma (beaucoup), de l'actu (un peu) et toute cette sorte de choses [A bit of everythying: cinema (a lot), news (a little) and all this kind of things]

Publié le par Djayesse
Publié dans : #Cinéma, #Muet, #Drame, #Frank Powell
Embrasse-moi, Idiot (a Fool there was - Frank Powell, 1915)

D’un côté une famille américaine heureuse : le père John Schuyler (Edward José) et la mère (Mabel Frenyear) et leur petite fille (Runa Hodges).

De l’autre, une femme fatale, véritable vampire (1) sexuel (Theda Bara).

Bien sûr, l’une va rencontrer le représentant masculin de l’autre pour une descente aux enfers en règle avec aucun recours à une quelconque fin heureuse.

 

Ca commence par un poème de Kipling qui va servir de trame pour le scénario un tantinet décousu desservi par un montage parfois rudimentaire : cette même année Griffith sortirait The Birth of a Nation qui, malgré ses relents racistes, reste tout de même un repère pour cette année 1915 aux Etats-Unis.

Il n’empêche, tout commence bien, avec cette famille unie qui se retrouve après un périple en mer du père. La famille est réunie avec la sœur et son futur fiancé pour admirer le coucher de soleil.

Mais outre le fait qu’un intertitre nous prévient qu’il s’agit du dernier instant de bonheur de ce petit groupe, un détail attire notre attention : si les personnages restent immobiles, les vagues vont et viennent à l’envers !

Nous sommes prévenus : plus rien ne va aller.

 

Et cette annonce tragique va se révéler et nous allons assister à la déchéance programmée de cet « idiot » dont parle le titre. Programmée parce que la belle vampire n’est pas à son coup d’essai : nous rencontrons deux de ses anciennes victimes dans un état fort décrépit.

Le premier est devenu mendiant et ouvre la porte aux gens riches qui descendent de voiture en espérant une petite pièce ; quant au second il va se suicider sur le pont du bateau qui emmène Schuyler vers sa destinée et surtout la jeune femme maléfique.

 

Et question déchéance, Frank Powell ne nous épargne rien, faisant de cet idiot une épave méprisée de tous qui, par faiblesse, succombe dans les bras de ce succube.

La fin de parcours de cet homme seul dans sa maison aux rideaux tirés est certainement le moment le plus beau et le plus fort du film : les rideaux vont être ouverts progressivement, révélant petit à petit l’état de délabrement de la maison et de son propriétaire. Cette lumière crue et blanche qui entre en devient presque cruelle.

 

Et puis il y a Theda Bara.

Il s’agit de son premier long métrage en tant que vedette, même si son rôle n’est pas très reluisant : c’est une femme sans scrupule, croqueuse de diamants assumée et surtout briseuse de ménage. Mais elle est tellement magnifique qu’on lui passe tout… Et surtout, le scénario épouse le parti de la morale de son époque : il n’était pas question qu’une femme libre soit en plus bien présentée.

Mais malgré tout, Powell tient bon et évite la happy end qu’on aurait pu attendre, tant le point de vue de la femme blessée est développé.

Mais non, jusqu’au bout l’idiot le restera et la morale ne sera pas entièrement sauve : la belle vampire s’en sortira.

On notera d’ailleurs l’apparition de Theda Bara alors que l’ami de la famille (Clifford Bruce) a amené la femme et la fille pour une dernière tentative (ratée, évidemment) de réconciliation : elle est tout en superbe et surtout habillée de blanc, symbole d’une pureté qu’elle ne possède plus depuis un certain temps…

 

Un dernier mot sur le titre français. « Embrasse-moi, idiot » fait référence à la réplique la plus célèbre du film : « Kiss me, my fool » que la femme dit à son amant un peu avant qu’il ne se suicide.

 

PS : la vampire chez elle, allongée pendant que sa servante arrive n’est pas sans rappeler Olympia d’Edgar Manet. Mais il n’y a pas de raison de s’exciter, la belle Theda est habillée.

 

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