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Le Monde de Djayesse

Le Monde de Djayesse

Un peu de tout : du cinéma (beaucoup), de l'actu (un peu) et toute cette sorte de choses [A bit of everythying: cinema (a lot), news (a little) and all this kind of things]

Publié le par Djayesse
Publié dans : #Cinéma, #Pierre Salvadori, #Comédie
De vrais Mensonges (Pierre Salvadori, 2010)

Quelle bêtise de mentir : à un moment, tout se sait.

 

Oui. Mais cela nous aurait évité un si beau film, plein de subtilité, de tendresse et de brio.

D’un côté Emilie, jeune coiffeuse-esthéticienne, belle comme le jour (1) ; de l’autre Jean (Sami Bouajila), ancien employé de l’Unesco avec un CV long comme au moins deux bras, qui se remet d’une « nervous breakdown » (2) en assurant la maintenance dans le salon d’Emilie, mais surtout amoureux éperdu de sa patronne ; et dans un autre côté, Maddy (Nathalie Baye), mère d’Emilie, muse éternelle, mais accrochée à des chimères, et surtout un amour défunt pour le père d’Emilie (Daniel Duval, méchant patenté du cinéma français depuis La Dérobade…) qui a refait sa vie ailleurs.

Et au milieu de tout ça, Paulette (Julie Chemla), employée un tantinet nunuche, tampon entre tout ce monde, ou plutôt entre Emilie et les autres…

 

Avec un tel titre, on ne pouvait attendre qu’une comédie enchaînant les mensonges les uns après les autres, arrivant au constat évident : que de temps perdu alors que tout aurait été si simple, avec dès le départ la vérité. Mais si la vie était simple, on n’aurait pas non plus un si beau film plein de subtilité et d’émotion, servi par des interprètes au diapason.

Et comme toujours, Pierre Salvadori est (partout) derrière cette histoire où la vérité, si simple, n’amènerait certainement pas cette émotion attendue à chaque nouveau film par les spectateurs.

 

Cette histoire de mensonges est d’autant plus réussie que chacun qui la voit se retrouve à un moment ou à un autre derrière ces faux-semblants qui s’égarent et amèneraient quelque drame s’il ne s’agissait ici de cinéma.

Combien de mensonges, assumés ou par omission, afin de protéger une autre ou soi-même et qui au final font souffrir, parce que c’est inéluctable, à un moment quelqu’un souffre, et souvent l’initiateur du mensonge, malgré ses bonnes intentions.

Et ici, la souffrance est pour tous : pour Emilie qui n’arrive pas à se situer par rapport à Jean, ni à percevoir à travers ses attitudes son profond amour qu’il éprouve, gêné, et timide de par sa situation, professionnelle (il est l’employé) tout comme personnelle (il a un parcours à mille lieux de celui d’Emilie), et qui finit par en souffrir.

La souffrance touche aussi Maddy, perdue dans ses souvenirs, touchée par cet amour inexistant (3), et qui se rend compte qu’elle a fait fausse route.

Et si le drame effleure l’intrigue, c’est pour être tout de suite remplacé par un élément de comédie qui, s’il ne remet pas les choses à leur place, tout du moins atténue l’effet désastreux attendu.

 

Et l’habileté de Pierre Salvadori – ici – c’est d’entrer directement dans le vif du sujet : il nous révèle l’élément déclencheur alors qu’on n’a pas eu le temps de s’habituer au cadre de l’intrigue. Mais de toute façon, ces mensonges promis par le titre sont les choses les plus importantes, alors autant faire le contraire de ce qui aurait été attendu : on entre dans le mensonge tout en distillant des éléments de vie, du quotidien des différentes protagonistes, puisque de toute façon, c’est ce que nous, spectateurs, sommes venus voir.

Et si les mensonges sont là, encore une fois le titre nous ramène à la vérité : ces mensonges sont vrais, puisqu’à chaque instant de leurs développements, les raisons invoqué »es vont le justifier jusqu’à le maquiller, amenant une autre vérité, à l’opposé de ce qui était attendu, par les différents personnages tout comme les spectateurs, avec une différence notable entre les uns et les autres : les spectateurs eux, gardent le sourire aux lèvres.

 

Et au final, nous ne sommes pas loin des Emotifs anonymes de Jean-Pierre Améris : la seule différence – malheureusement de taille – c’est que les émotifs ne disent rien.

Mais le résultat est le même : tout le monde passe à côté d’une occasion, celle d’une vie, pour une histoire d’apparences.

 

Et au final, on se dit : « que de temps perdu : c’est pourtant simple d’aimer ».

 

Non ?

 

 

PS : Et la vérité dans tout ça ? Quelle importance quand une histoire d’amour se développe et va jusqu’au bout. Mais tout de même, quand elle est révélée ici, elle n’est pas simple et crue. Elle se pare d’artifices (le scénario, bien sûr) mais à un niveau très haut puisqu’elle est multiple, de par ses protagonistes et ses niveaux : dans une scène de révélation impliquant un montage parallèle, tout aussi subtile que le reste du film, mais qui en plus est des plus pertinents.

 

PPS : Je vais en rester là, sinon nous y serons encore demain, et même après…

  1. C’est normal, c’est Audrey Tautou.
  2. Prononcer [nervus brεkdon] ou pour les ceusses qui ne lisent pas la phonétique : nervousse brèkdône.
  3. Il faut dire qu’Emilie lui a adressé sa lettre d’amour pour la sortir de sa dépression. Mauvaise idée, tout à fait, mais tellement belle…
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