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Le Monde de Djayesse

Le Monde de Djayesse

Un peu de tout : du cinéma (beaucoup), de l'actu (un peu) et toute cette sorte de choses [A bit of everythying: cinema (a lot), news (a little) and all this kind of things]

Publié le par Djayesse
Publié dans : #Cinéma, #Muet, #Comédie dramatique, #John Ford
Upstream (John Ford, 1927)

« Upstream » (« en amont »), c’est l’endroit où arrive l’acteur qui a réussi : le point le plus élevé. La gloire, quoi.

Mais comme disaient les Romains : « il n’y a pas loin du Capitole à la roche Tarpéienne. » (1)

 

A la pension de miss Hattie Breckenbridge Peyton (Lydia Yeamans Titus), on accueille des artistes. Enfin, on accueille surtout des artistes qui ne réussissent pas beaucoup et on y croise outre la logeuse, une (très) vieille gloire de la scène, beaucoup de monde : un pensionnaire modèle (Raymond Hitchcock), toujours affable avec la logeuse mais qui n’est rien d’autre qu’un vieux cabot ; Campbell-Mandare (Emile Chautard) un vieux tragédien shakespearien jusqu’au bout des ongles ; un charlatan préparant son produit miracle (Gus Hoffman) ; un jongleur (Francis Ford) ; les danseurs de claquettes Callahan et Callahan (Ted McNamara & Sammy Cohen, à moins que ce ne soit le contraire) ; un couple de sœurs danseuses (Lillian Worth & Judy King)  qui sont en fait mère et fille ; une soubrette (Jane Winton) aux longues jambes ; Juan Rogdriguez (Grant Withers) un lanceur de couteau qui n’est pas plus espagnol que les autres ; Gertrude « Gertie » Ryan (Nancy Nash) une jeune première et Eric Brashingham (Earle Fox), un grand acteur, surtout de par son nom, déjà porté avant lui avec beaucoup plus de talent.

Si ce n’était les problèmes d’argent, tout irait bien dans cette pension.

Un jour, Brashingham est appelé à Londres tenir le rôle de Hamlet : chacun va l’encourager voire l’aider à devenir un grand et atteindre ce fameux amont, synonyme de gloire.

 

Pas de doute, nous sommes chez John Ford (et en plus, son frère est là). On retrouve ici un microcosme qui est la marque de ses films : tout le monde vie au même endroit, et on se soutient les uns et les autres pendant les coups durs qui sont monnaie courante. Mais ce microcosme possède ses individualités plus ou moins comiques (2), qui forment une famille hétéroclite très attachante.

Si la logeuse réclame sans cesse ses loyers – ce qui est tout à fait légitime – l’absence d’argent n’empêche pas tout ce petit monde de bien s’entendre. Enfin presque, parce que la jeune première – la belle Gertie – est convoitée à la fois par Brashingham et Rodriguez (en fait il s’appelle Jack La Velle), bien que le premier ait la préférence de la demoiselle.

Alors quand il s’en va vers la gloire et qu’il oublie ses racines, la route est libre pour Rodriguez.

 

Si cette comédie semble bien légère, il ne faut pas se fier aux apparences. D’une façon amusante, Ford nous brosse un portrait de ces artistes qui ont moins de succès mais pas seulement parce qu’ils n’ont pas de talent. Et l’ambiance familiale qui baigne cette pension amène la chaleur indispensable à cette intrigue qui peut facilement tourner au drame : le moment où Campbell-Mandare porte son buste de Shakespeare qu’on ne lui reprendrait que pour quelques scènes est l’un des moments les plus dramatiques du film, mais atténué par l’arrivée de Gertie qui redonne de la vie et peut-être de l’espoir au vieux tragédien.

Alors bien sûr, on retrouve quelques détails qui perdureront dans les films suivants comme l’alcool (pour une fois, ce n’est pas Francis qui en est imbibé), ou la fête en l’occurrence le mariage.

 

Longtemps perdu, ce film fut retrouvé et restauré – pour notre plus grand plaisir – même si à un endroit, le film est irrémédiablement abimé (quelques secondes sur une heure, on ne va pas non plus rouspéter).

De plus, Ford s’essaie à différentes techniques dont les éclairages, et on assiste à un bel effet de champ/contre=-champ qui voit Raymond Hitchcock ouvrir sa porte (champ) et sortir de sa chambre (contre-champ) d’une manière formidablement fluide. Un exploit.

Et comme nous sommes dans le registre de la comédie, on a beaucoup de plaisir à voir le duo Callahan & Callahan évoluer : ce sont eux les véritables ressorts du comique, dansant, sautant et plaisantant, avec en point d’orgue la préparation du punch de mariage avec les flacons du charlatan… Un poème !

 

Quant à la roche Tarpéienne dont je parlais en ouverture, c’est Brashingham dont le talent va de pair avec une fatuité démesurée qui, d’une certaine façon, y sera précipité. Bien fait !

 

 

  1. « Arx Tarpeia Capitoli proxima. »
  2. Plutôt plus, c’est une comédie.
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