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Le Monde de Djayesse

Le Monde de Djayesse

Un peu de tout : du cinéma (beaucoup), de l'actu (un peu) et toute cette sorte de choses [A bit of everythying: cinema (a lot), news (a little) and all this kind of things]

Publié le par Djayesse
Publié dans : #Cinéma, #Comédie dramatique, #Leo McCarey
Elle et Lui (Love Affair - Leo McCarey, 1939)

Michel Marnay (Charles Boyer) est un riche oisif mâtiné d’un playboy. Il est sur un transatlantique qui le ramène aux Etats-Unis pour épouser une riche héritière (Astrid Allwyn). Sur le paquebot, il fait la connaissance de Terry McKay (Irene Dunne), qui rentre aussi aux USA pour épouser son patron (Lee Bowman). Bien entendu, ils tombent amoureux l’un de l’autre (1).

A l’arrivée, ils se promettent de se retrouver six mois plus tard avec une véritable situation, sauf si entre temps ils ont trouvé autre chose de plus sérieux. Où ? En haut de l’Empire State Building, l’endroit (en 1939) le plus près du ciel.

Le premier juillet, Michel est en haut du gratte-ciel (terme on ne peut plus pertinent en ce qui nous concerne). Il attend Terry. Qui ne viendra pas. Elle a eu un accident juste en bas de l’immeuble.

 

Superbe.

Leo McCarey, l’un des princes de la comédie hollywoodienne, réussit ici sa rencontre avec la tragédie, donnant un film magnifique, avec une histoire d’amour inoubliable. Tellement que le film sera refait, et même par McCarey (mais ceci est une autre histoire, même si c’est la même histoire…). Certes, le duo de stars qui tient le haut de l’affiche est impeccable, mais cela ne suffit pas : le talent de McCarey et son sens de la mise en scène sont primordiaux ici. Sans oublier quelques noms glanés durant le générique d’introduction : Delmer Daves (scénario), Edward Dmytryk (montage), Rudolph Maté (prises de vue)… On a vu largement pire !

 

Mais surtout, ce qui fait (aujourd’hui encore) le succès du film, c’est son aspect humain. Si Marnay n’est pas une personne très fréquentable quand commence le film – un riche oisif qui ne sait rien faire d’autre que peindre (2) – sa rencontre avec Terry va l’ouvrir à la vraie vie : Terry, si elle doit épouser son patron, ne vient pas d’un milieu aisé comme lui. Elle s’est faite toute seule, et ce mariage est la consécration de son parcours – sans qu’elle soit pour autant une croqueuse de diamants (3).

Et cet accident qui fait basculer le film dans la tragédie, est au bout du compte une très bonne chose. Sans lui, cette grande humanité des personnages ne se serait pas révélée à eux-mêmes. Et à cela s’ajoute l’incontournable magie de noël (le film se termine le 25 décembre) : c’est la période des miracles et ce qui arrive en est (presque) un.

 

Bien entendu, la révélation finale est extraordinaire et comme toutes les grandes révélations, elle est muette : les images se suffisent à elles-mêmes et l’émotion des personnages se transmet naturellement, d’autant plus que nous savons ce qu’il s’est passé, à la différence Marnay. Mais cette révélation magnifique passe aussi par des retrouvailles d’une immense subtilité. Les deux amants se retrouvent après presque un an sans se voir (ils s’étaient quittés le premier janvier) et le rendez-vous manqué, véritable tournant de l’histoire, est abordé avec beaucoup d’habileté et d’élégance par Marnay qui a attendu la véritable fin du jour (minuit) avant de renoncer. Et si Terry entre dans son jeu – un mensonge (très) pieux – c’est aussi pour lui montrer qu’elle n’est pas dupe de son subterfuge.

 

Je terminerai en revenant sur ce qui est, à mon avis, le véritable basculement de cette liaison : la rencontre de la grand-mère de Marnay à Madère, Janou (Maria Ouspenskaia). C’est une vieille femme adorable, qui comprend les choses indicibles, et même avant ce couple en devenir. C’est ce (très court) séjour chez elle qui va rapprocher Terry et Michel, et la chanson qu’elle interprète au piano, rapidement accompagnée par Terry, n’est pas innocente : Plaisir d’Amour. Le « plaisir d’amour, c’est ce que vit quotidiennement Marnay avant sa rencontre avec Terry. Et le « chagrin d’amour », c’est l’une des conséquences éventuelles du rendez-vous manqué.

Mais McCarey, spécialiste de la comédie, ne peut pas les laisser s’en tirer avec le seul chagrin.

Et quand le film se termine, le sourire qui reste sur nos lèvres, est aussi l’œuvre de McCarey…

 

  1. Le titre original : Histoire d’amour / Liaison.
  2. Et encore, il n’a créé qu’une toile !
  3. Autrement, l’histoire (et donc le film) n’aurait pas marché.
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